Appartement de Charlie Nine

Épouse moi, et je te prouverai que tu peux encore me faire confiance. Épouse moi et laisse moi t'aider à construire une vraie vie. Une vie stable et heureuse. Tu cherches le bonheur, Ellen, c'est pour ça, que tu vas voir ailleurs, tout le temps. Tu cherches, tu cherches, et tu me fuis. Parce que tu sais, que je suis le seul à pouvoir t'offrir ce que tu cherches.

Je sais pas ce que je cherche, mais c'est sûrement pas le mensonge. Moi aussi, je serai la bonne femme qui t'attend à la maison pendant que tu la coccufies sous prétexte d'avoir du boulot avec le gang ? Moi aussi, je vais me faire jeter, divorcée, quand t'en préfèreras une autre ? Non merci. J'ai ma fierté. Et ça, j'accepte pas.

... Je comprends. Excuse moi, Ellen. Tu as sans doute raison, je ne vaux plus rien. Et je ne peux pas te prouver que je suis digne de confiance après ça. Il vaut mieux qu'on s'arrête là.

C'est con, je crois bien que je t'aimais pour de bon. Mais pas comme ta femme. Je te l'ai dit, je suis pas sage. Prends soin d'eux, Charlie. Surtout, prends bien soin d'eux.

Je t'aimerai toujours, quoique tu penses, Ellen. Au revoir...

Je la regarde partir à contre coeur. Mon Ellen... La seule que j'aime vraiment, après tout ce qu'on s'est dit sur l'oreiller, comment oses-tu me tourner le dos pour un simple mensonge...?

Je retiens des larmes pour ma fierté. Mais bon sang que j'ai mal... Adieu, Ellen.

Putain de vie, putain de mois de mars.

C'est Noah qui vient vous ouvrir, il vous fait un grand sourire et vous laisse entrer avant de retourner au salon, pour jouer avec ses voitures robots qui planent toutes seules dans les airs. Dernière technologie, jouets hors de prix. Charlie est installé devant sa baie vitrée qui donne sur le quartier riche.

Rien que sa position montre qu'il est contrarié. Pensif, et qu'il ne vaut mieux pas l'énerver d'avantage... Abigail, qu'est-ce que tu aimerais être loin d'ici... Mais d'un côté, si Bastian te propose de monter les échelons, il faut bien que tu te rapproches du grand chef pour rentrer dans sa sphère privilégiée.

Lui montrer que tu en vaux la peine ! Il ne tourne même pas un regard vers vous, ne parle pas. Bastian s'approche de lui avec précaution, et souffle :

Bonjour, Charlie.

Bonjour à vous deux. Répond t-il simplement.

Il s'est coupé les cheveux, et de dos, il est encore plus sexy que d'habitude, son charisme l'accompagne, lui colle à la peau, sans fin... Dur de ne pas tomber sous son charme...

Ces derniers jours ont été plus qu'éprouvants... Passé l'arrivée de Lola, cette boule de nerfs dans l'appartement de Bastian, les jours se sont succédés dans un ennui mortel. La promesse de Bastian de m'entraîner me semble bien loin... Mais il l'a promis... Alors je lui fais confiance mais cela ne m'empêche pas de ruminer dans mon coin que chaque jour passe sans qu'il ne m'emmène avec lui vu que je n'ai pas vraiment de mission en ce moment.
Je le regarde partir, puis je passe la journée à l'appartement... Heureusement que Lola me tient compagnie les après-midi et qu'elle a entreprit de m'apprendre l'espagnol avec une joie non dissimulée car je sens que j'aurais pété un câble ! Regarder les heures passées, sans aller s'entraîner ou sans bosser vraiment, c'est chiant !
Ce que j'en avais marre de ces jours sans fin... Du coup, je fus surprise quand, le vendredi, Bastian rentre plus tôt pour me dire de me préparer à m'entraîner avant de me dire que l'on passe chez Charlie avant.

Prise de court, je ne peux que lui obéir et me préparer à sortir faire un entrainement avec lui même si j'aurais voulu être prévenue plus tôt. Charlie ! J'ai tout sauf envie de le voir pour l'instant mais c'est vrai que depuis le début de la semaine, son bras droit semble pensif voir légèrement nerveux.
Il n'a plus reparlé du faire que le grand boss soit venu bosser ou non... Mais à voir sa tête tous les soirs me confirme assez qu'il y a un truc avec Charlie Nine, et que Bastian lui-même ne sait pas quoi, mais que ça le travaille.
Soupirant sur le chemin vers la maison du chef des One Niners, je tente de me préparer mentalement à l'entretien qui nous attends. Et dommage que je n'ai pas plus de temps que cela pour le faire... Il n'habite décidément pas très loin le chef...

Je suis docilement Bastian, retenant quelques phrases désagréables ou nerveuses... Quand il frappe à la porte, je suis soulagée de voir Noah en premier.
Ah quel mignon petit bonhomme ! Il m'arrache un sourire sincère avant de nous inviter à entrer. Mais que ce soit lui qui nous ouvre... Cela doit bien nous dire que Charlie va pas fort. J'avale difficilement ma salive quand on se dirige vers le salon, j'aperçois à peine les jouets de Noah, super perfectionnés et dernier cri tant je sens la nervosité me reprendre. Abigail, ça suffit. Si le bras droit veut te proposer quelques échelons supplémentaires, tu dois bien passer par le grand chef... Même si c'est pénible !
Je reste néanmoins un peu en retrait quand Bastian s'approche de Charlie, qui nous tourne le dos, face à la baie vitrée. Je n'ai même pas le courage de regarder le paysage, seul le dos de Charlie m'interpelle.

Il a changé. Je ne saurais dire comment ni en quoi mais il a changé... Pas que physiquement... Certes il s'est coupé les cheveux, mais je trouve que son charisme déborde d'avantage, et c'est bien difficile d'y échapper et de ne pas se laisser tenter par tant de charme... Merde. Reprend toi Abi. Tu sors avec Bastian, tu n'as que Bastian en tête et personne d'autres. C'est juste le fait qu'il semble différent aujourd'hui qui t'interpelle. Ouais, voilà... C'est juste Charlie Nine, rien d'autre. J'ai vraiment du mal à m'en convaincre, pour plus de sûreté je reste en retrait pour lui répondre à mon tour.

Bonjour Charlie. Pouvons-nous faire quelque chose pour vous? Vous semblez... Nerveux, enfin plus distant que d'habitude je veux dire... Bastian s'inquiète pour vous.

Je ne sais si cela passera mais je ne sais pas trop sur quel pied danser avec lui. Je me contente donc d'énoncer mes paroles avant de reprendre mon mutisme silencieux, tentant vainement d'accrocher le regard de son bras droit.

Je me tourne vers eux, fixe mon regard froid dans celui d'Abigail.

Il n'y a rien à faire. Bastian, pourquoi t'entêtes tu à venir ? Je t'ai dit que ça allait, si je te laisse la gestion du gang c'est uniquement parce que je te forme à devenir mon successeur. Avec tout ce qui arrive, nous ne sommes pas l'abri d'un attentat contre moi si on découvre ma nature. Le jeune Bryan semble avoir une dent contre les Niners en ce moment.

On se demande pourquoi, hm ? Enfin, qu'importe. Pourquoi êtes vous là, Abigail ? Vous venez jouer la baby sitter pour mon fils ?

Arrête de t'en prendre à elle, Charlie. Elle n'a rien fait. Elle fait du bon boulot, tu le sais. Je pensais la faire monter en grade après un entraînement avec moi. Mais j'ai besoin de ton assentiment pour ça.

Monter en grade. Et quel rôle aimerais-tu jouer dans le gang ?

Alors comme ça, Charlie serait en train de former Bastian au rôle de chef de gang? Curieusement, ce dernier ne m'en a jamais parlé, peut-être croit-il que Charlie utilise cette manière de faire pour échapper à quelque chose? Car n'a-t-il pas un fils? N'a-t-il pas un héritier qui peut reprendre plus tard sa succession? Même s'il est jeune, même s'il y a des risques à prendre en compte comme un assassinat, le gang est des plus soudé et soutient son chef au maximum. Alors pourquoi cette réaction? Pourquoi ce revirement?
Car même si Bryan est sur les Niners depuis cinq mois, dès qu'il trouve une information intéressante, il se tourne vers un autre gang. Il agit comme une véritable girouette, qui nous dit pas que demain, ou après demain il changera de cible, et se tournera ailleurs, hein? Ce mec est un véritable accro au boulot et à la moindre parcelle d'information sur les gangs, il suffirait de lui mettre un info croustillante et l'envoyer ailleurs, et le tour est joué. Il n'est pas plus compliqué que cela !

Par contre, je le prends personnellement, ses dernières paroles. Ce serait donc à cause de moi si Summer Junior s'en prend à nous? Ce serait de ma faute? Et je ne serais bonne qu'à m'occuper de son rejeton? Nan, mais pour qui il se prend ce mec? Pour le coup, exit le charisme dont il faisait preuve, cela ne me fait plus ni chaud ni froid, je serre juste les poings en silence pendant que Bastian intervient et lui demande d'arrêter de me prendre à parti.
C'est sympa à lui mais là, c'est mes plates bandes qu'il vient de piétiner le chef. C'est à moi de régler ce problème, et qu'importe le danger ! Qu'importe si cela doit m'apporter les foudres de Charlie Nine... Je vois pas pourquoi je le laisserais piétiner ma fierté, sachant que je bosse pour lui et que je le fais mon travail, avec brio en plus.
Je décide de le défier du regard à mon tour, soutenant son regard froid. Si je lui montre que j'ai peur, jamais je ne pourrais lui montrer ce que je vaux, et jamais je ne pourrais me faire une véritable place dans le gang. J'en ai marre de faire les menus travaux, marre de jouer la sous-fifre alors que je ne vis plus que pour les One Niners !

Une personne de confiance. Peut-être que cela serait présomptueux de penser à un rôle de bras droit, mais être l'assistante de ce bras droit ferait parfaitement l'affaire. Donnez-moi des affaires importantes à tenir et je le ferais. Permettez-moi d'être la liaison entre plusieurs affaires, entre plusieurs gangs, et je le ferais. Si vous ne me donnez pas la chance de montrer ce que je vaux, comment pourrais-je vous convaincre? J'en ai marre de faire les basses-besognes, si je suis une Niner, je dois agir comme telle et pour cela, faire plus qu'une simple mission est nécessaire.

Je desserre les poings et fixe encore plus intensément Charlie, je m'en fiche d'être insolente ou provocante, il doit me prendre au sérieux à la fin, merde alors !

Pourquoi serais-je encore ici dans ces cas-là? Je suis une Niner, et je pense que cela me donne tous les droits de pouvoir vouloir plus. Faites-moi confiance Charlie, je ne vous décevrais pas.

Auquel cas, il n'aura qu'à me tuer et l'affaire sera réglée, mais je ne le dirais certainement pas devant Bastian qui n'approuverait pas cette façon de pensée. Mais j'ai besoin d'être active et de seconder le bras droit de Charlie Nine. J'ai besoin de me faire une place, de la tenir et de montrer de quoi je suis capable !

Je considère Abigail du regard et finit par me tourner de nouveau vers la baie vitrée :

Fais-ce que tu veux. J'ai toujours eu confiance en toi, Bastian, de toute façon.

Mon regard se perd dans l'ébullition de New York. Je ne suis pas bien, malgré ce que j'essaye de montrer aux autres. L'affaire de la semaine dernière me touche beaucoup plus que je ne le voudrais...

Deux fois. Deux fois que je la perds. A cause d'une connerie.

Ellen...murmuré je tout bas.

Papa, c'est quand qu'on joue ensemble ?

Je soupire et ne répond pas. J'ai perdu le goût de tout depuis ces paroles "Je m'en vais". Même mon fils n'arrive pas à me remonter le moral. Je ne veux pas Karine ni aucune autre femme. Je ne veux qu'elle !!

Sans prévenir, je me retourne et balance les papiers et objets sur mon bureau par terre :

PUTAIN !!! SORTEZ !! FOUTEZ-MOI LE CAMP !!!!!!!

Alors que j'attends, bouillonnant légèrement de colère et de frustration, cela explose littéralement à l'intérieur de mon esprit quand Charlie fait mine de m'ignorer et de répondre à Bastian, comme si c'était lui qui avait parlé, et non moi !
Nan mais je rêve là ! C'est le comble ! Il me demande enfin ce que je veux, mon avis en somme, et voilà tout ce que je récolte comme réponse? Une réponse évasive et effectuée pour son bras droit, non pas la sous-fifre qu'il a devant les yeux. Non, pour quelqu'un d'autre ! Il m'ignore. Il ose me prendre pour une moins que rien? Il ose avoir besoin de l'aval de son bras droit? Il ne prend que l'avis de ce dernier, et non le mien? Nan mais où va le monde?
Fait chier ! C'est moi qui veut travailler, c'est moi qui veut être utile ! Bastian l'est déjà lui mais moi, rien, que dalle ! Et le chef du gang ne me prends pas plus au sérieux que ça?
Je fais un pas en avant, inconsciemment, comme si en me rapprochant j'espérais faire le déclic chez cet homme, certes charismatique mais non moins un homme. Et c'est tout ce que je vois, là, sous mes yeux. Un homme plus qu'un chef, quelqu'un de fatigué, d'épuisé. Un homme qui fuit les réalités, qui s'enferme dans son mutisme quitte à ignorer ses subordonnés ! Même les plus intimes ! Car il ne prends même pas en compte que Bastian ne s'inquiète pas pour lui que pour le boulot mais pour tout le reste ! Tout !

Je serre les poings alors que je crois entendre le prénom d'une femme émettre de la bouche de Charlie, mais étant trop loin de moi je n'en suis pas vraiment certaine, peut-être est-ce juste le fruit de mon imagination mais à cet instant il semble dépité, désespéré, à bout. Et ça, il a beau vouloir faire preuve de charisme, ça ne m'échappe pas, il ne va pas bien, sinon il aurait répliqué à mes paroles, sinon il ne se serait pas retourné aussi vite pour se perdre dans la contemplation de New York... Nan, il y a un truc qui cloche là.
Même l'intervention de Noah ne provoque rien chez cet homme. Même son fils ne le sort pas de son mutisme, mais qu'est-ce qu'il y a à la fin bon sang? Je me pose la question quand il se retourne brusquement pour nous faire une jolie petite crise devant nos yeux. Charlie Nine qui perd son calme ! Je n'avais jamais vu ça auparavant ! Là, c'est clair, ça cloche, et pas qu'un peu ! Qu'est-ce qui peut le mettre dans un tel état? En attendant, il n'a pas à être aussi froid avec son fils ! Ni à lui montrer une réaction aussi puérile ! Il est l'exemple ici? Que dalle, ouais !

Alors ne m'écoutant que moi-même, je chope un livre qu'il a balancé sur le sol et je lui balance sur le corps, qu'importe où ça le frappera tant que ça le fait réagir !

Non mais c'est quoi votre problème ?! D'abord vous nous ignorez, maintenant vous êtes froid avec votre fils et là vous faites une crise tout ce qu'il y a de plus puérile ! C'est ça l'exemple que vous voulez montrer à Noah ?! C'est ça votre manière de faire ?! Vous enfermer dans le mutisme et le silence plutôt que de dire vos problèmes à des gens qui s'inquiètent pour vous ?! Qu'est-ce qui va pas bon sang ? Qu'est-ce qu'il vous arrive? Ce n'est pas Charlie Nine que j'ai devant les yeux mais une simple poule mouillée ! Juste un homme qui ne veut pas affronter la réalité ! Si vous parliez à quelqu'un, ça n'arriverait pas ! Lâchez-vous ! Crachez le morceau mais arrêtez de vous enfermer et de vous en prendre aux autres ! Charlie Nine n'agirait jamais de la sorte !

Je suis hors de moi, ce que ça m'énerve ce genre d'attitude ! Il a une famille lui, toute proche et voilà comment il la traite? Voilà comment il traite son entourage le plus proche, en comptant Bastian? Nan mais où va le monde !
Je sais que j'ai été trop loin, que j'ai été trop familière, que j'en ai peut-être trop dit, mais j'en ai marre ! Marre de ces caprices stupides alors qu'on s'inquiète juste pour lui ! On a pas à être traité comme de la merde !

Bastian ouvre de grands yeux quand tu t'approches de Charlie comme une furie et lui jette un livre à la tête. Il parcourt rapidement la distance qui vous sépare alors que ton chef lève un regard furieux et meurtrier sur toi. Ton petit ami t'attrape avec force par le bras et te garde derrière lui.

C'est bon. On s'en va ! Calme-toi Charlie. On parlera plus tard.

Ne te laissant pas le choix, il te fait sortir de l'appartement et te suit, ferme rapidement la porte sur un Noah qui pleure légèrement face à la colère de son père.

On peut rien y faire... On peut rien y faire, Abigail. Il va se calmer seul...

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