Episode 4 : The Eternal Snake [Bryan]

Quatre longs mois de vide et extrêmement difficiles sans ma famille, devant me contenter des nouvelles de la santé de mon fils par trois intermédiaires. Ce sont des moments difficiles pour moi qui ais toujours eu l'habitude de les voir tous les jours.

De plus, ces quatre derniers moi j'ai subi énormément de souffrance physique en raison des entrainements surhumains que m'a infligé ma cousine. Je lui en voudrais de m'avoir autant torturé si nous avions eu tout le temps devant nous. Si j'ai refusé les produits dopants de prime abord, je bénis Ellen de me les avoir imposés car j'aurais souffert encore plus longtemps.

Malgré les deux jours de repos qui m'ont été accordés avant d'aller à la rencontre de ma future bras droit qui a accepté la proposition de ma cousine, j'ai tout le corps engourdi et sensible.

J'écarquille les yeux en voyant l'état dans lequel a été laissé le QG, et j'imagine que toutes les anciennes planques de Staten Island sont dans le même état. Mais j'ai à peine le temps de repenser à la déco que le second ascenseur annonce l'arrivée de celle que nous attendions.

Avant qu'elle n'arrive à ma hauteur, je déglutis difficilement face à cette créature sortie tout droit d'un rêve, voire d'un fantasme. Le charme qu'elle dégage est si puissant que je pourrais me liquéfier sans prévenir. Malgré tout je me persuade que c'est l'effet de surprise et que je vais finir par m'y habituer.

Je garde constance tant bien que mal, et pour se faire, je suis obligé d'utiliser mon charisme pour éviter de bégayer en lui répondant. Ellen a triché en refusant de me donner la moindre information sur elle. D'ailleurs son sourire en coin prouve bien qu'elle s'attendait à mes réactions, bien que je les cache au maximum.

Je maudis ma cousine tandis que la mannequin s'approche, aguicheuse. Je respire lentement pour éviter que les deux femmes présentes dans la pièce n'entendent le bruit des battements de mon cœur.

Je dois parler, c'est impératif, c'est le seul moyen que j'ai pour paraître le plus naturel possible, même si Carmen sait pertinemment qu'il a un effet presque animal sur moi.

Je ne fuis pas son regard, ce n'est pas le genre de la maison, bien au contraire je la détaille du regard, ma langue passant vivement sur mes lèvres pour les humecter. Je prends la parole sûr de moi, comme si elle était un simple dossier, ce qui me permet d'écarter toute idée malvenue :

Enchanté Carmen. Je suis Bryan Summer, je crois que l'on ne me présente plus à New York. Si je n'ai pas oublié les règles de bienséance, il convient de prime abord de faire connaissance.

J'esquisse un léger sourire, puis offre un regard en coin à Ellen. La voyant faire semblant de ne pas avoir remarqué mon regard, je tapote légèrement ma montre de l'indexe :

Tu vas être en retard à ton cours de cuisine, cousine.

L'humour, le meilleur moyen pour moi de garder ma contenance. En quatre mois, j'ai eu le temps de la connaître, et j'ai pris l'habitude de la taquiner avec ça.


Je reporte immédiatement mon regard sur Carmen :

Lorsque je suis seul avec une femme, j'ai pour habitude au minimum de l'inviter à boire un verre et de l'accueillir dans un lieu présentable. Malheureusement l'actualité est telle que je suis contraint de faire une entorse à ces deux règles d'or. Mais puisque nous serons amenés à travailler ensemble, vous ne verrez pas d'inconvénient à ce que nous remettions cela à plus tard ?

Tout comme elle ne se prive pas de jouer de son charme, je libère mon charisme au fur et à mesure de mes paroles. Je ne la connais pas encore, mais j'ai l'impression que nous allons faire un duo d'enfer.


Je l'invite à me suivre car je ne compte pas rester statique à me liquéfier sur place, et l'avoir près de moi en train de marcher, cela me permettra de regarder mon environnement et de faire retomber ma libido le plus possible en voyant l'état du QG.

Vous connaissez un peu les lieux Carmen ? Pour ma part très peu, Ellen m'a fait visiter toutes anciennes planques des Little Dolls que récemment, bien que j'en connaissais les emplacements depuis quelques années.


Je lâche un léger soupir en passant le doigt sur un canapé renversé poussiéreux. Je fais une petite mine désolée en tournant la tête vers elle. Je touche machinalement mon alliance avant de terminer :

Ma cousine a-t-elle pris soin de vous expliquer brièvement l’œuvre que je souhaite construire avec vous ? Je me permets de vous le demander car elle est restée très silencieuse à mes questions concernant ma future bras droit, dans l'éventualité où vous accepteriez. Ceci dit je crois que votre arrivée a levé partiellement le mystère.

Malgré son charme, je me sens un peu mieux sans la présence de ma cousine qui nous a laissé à contre-coeur, elle qui aurait tant voulu me voir dérouler le tapis rouge à Carmen.

Je suis impressionné par le réflexe de Carmen, mais mon impression est de courte durée lorsque j'entends le nom de cette famille de russes que je ne peux plus sentir. Mon regard azur profond se plante dans le sien tandis que mon corps se raidit subitement. Un flot d'émotions menace d'exploser et se traduit par un afflux foudroyant de charisme incontrôlé.

Je garde le silence quelques secondes pour refaire tomber cette puissance inédite que je ne me connaissais pas. Je lui réponds calmement :

Ce n'est pas tout à fait exact. Je ne veux pas les éliminer, je veux les exterminer, tous, sans exception Je veux voir la peur dans le regard des Frères Sadovski lorsque je m'apprêterai à les exécuter, les uns après les autres.


Lorsque le nom de la famille russe sort de ma bouche, le "S" est terriblement accentué presque sifflé à la manière d'un serpent.

Cette famille est responsable de l'enlèvement de mon fils, et je sais que Konstantin Sadovski, l'un des leaders est celui qui l'a brûlé à vie au cigare sur tout le corps. Ces ordures lui ont tatoué des signes russes...J'ai la rancune tenace Carmen, et je rends au centuple ce que l'on fait subir à ma famille. Seule leur mort me satisfera, et ce n'est même pas suffisant.

Je lui laisse un peu le temps de prendre la température de ce qui nous attend avant d'enfoncer le clou :

Ils ne sont pas les seuls à me devoir des comptes, le FBI a également sa part de responsabilité dans ma déchéance, me poussant à faire parler mon sang commun avec Ellen. L'Agent Scott, me colle aux baskets depuis 5 ans, et avec l'aide de cette famille de ruskoff, elle m'a fait chuter deux fois de la tête du NYPD, la seconde a été fatale. Par sa faute je suis aujourd'hui l'ennemi public numéro 1. Elle devra payer aussi, elle doit comprendre son erreur, qu'elle s'est trompée de cible, mais qu'il est trop tard pour faire marche arrière.

Après la haine, c'est un sadisme à l'état pur qui se lit dans mon regard :

Pour arriver à mes fins, j'ai décidé de créer mon propre gang, New York vivra le chaos le plus machiavélique qu'elle n'ait jamais connu jusqu'ici. Et toi Carmen, avec tout le pain qu'il y a sur la planche, te sens-tu toujours prêtes à me suivre jusqu'au bout, avant que je t'en dise un peu plus ?

J'opine du chef sans quitter son regard dont je n'ai pas raté la pointe de malice qui s'y est installée :


Parfait.

Pour être tout à fait franc avec toi, je songe à monter mon propre gang depuis la chute du Dragon Noir. Ce jour là, j'étais sur la place publique, et mon invective à l'encontre de Haruchiki n'a pas plu à son gang, ce qui m'a valu un certain nombre de balles de snipers en pleine poitrine. Et j'ai compris. J'ai compris qu'il fallait éradiquer le mal par le mal.


L'idée a germé durant cinq longues années jusqu'à éclore tout récemment. Ma mentor m'a appris qu'un gang doit être monté à l'image de ses membres et plus particulièrement de son leader. Ce qui me correspond, c'est l'intellect, l'imprévision, la vivacité et la ténacité. 

Ces quatre caractéristiques couplées à ma volonté d'avoir un bras droit féminin, ont conduit Ellen a penser directement à toi. Sans m'en dire davantage je peux lire ton intelligence dans ton regard, tu es imprévisible et vive au moins physiquement pour ce que j'ai pu constater. Et je sens que comme moi, lorsque tu as ferré ta cible, tu ne la lâches pas.

Ma spécialité de comportementaliste me permet de déceler ce que je recherche chez mes interlocuteurs, et en l'occurrence je ne suis pas déçu du résultat.

Pour constituer mon gang après avoir consulté mon mentor, je me suis tourné vers le Mexique, et mon petit doigt me dit que tu es originaire d'Amérique du Sud, tu ne seras donc pas dépaysée. Je te rassure immédiatement, je ne souhaite pas faire de toi mon interprète, je parle couramment l'espagnol. D'ailleurs si tu préfères poursuivre dans ta langue maternelle, je n'y vois aucun inconvénient quand bien même tu as un parfait accent américain.

Je garde le silence quelques instants ensuite avant de terminer :

Dis-moi Carmen, que t'inspirent les serpents ?

Bien sûr cette question n'est pas anodine, elle me permettra d’enchainer sur la suite.

Lorsqu'elle gonfle sa poitrine, j'ai l'impression d'étouffer, je passe ma main droite sur le nœud de ma cravate pour la desserrer, même si je sais que ce n'est qu'une illusion. Instinctivement je passe de l'anglais à l'espagnol, son accent hispanique que je viens d'entendre y est-il sans doute pour quelque chose :

C'est exact. Et dans la définition que tu viens d'en donner, tu retrouves l'intelligence, l'imprévision et la vivacité qui nous caractérisent. En ce qui me concerne il s'agit particulièrement de vivacité d'esprit.

Je sors la feuille de papier sur laquelle j'avais reproduit l'Ouroboros chez Ellen, je la déplie et lui place entre les mains, tandis qu'au moment de retirer la mienne je suis électrisé par le contact de sa peau.

J'en ai soudainement le souffle coupé et suis obligé de reprendre plusieurs goulées d'air avant de tenter de poursuivre comme si de rien n'était. Mais c'est impossible et je fronce les sourcils quelques secondes suite à ce court-circuit cérébral :

C'est un Ouroboros, littéralement, le serpent qui se mord la queue. Il représente le cycle éternel de la nature. Ou si comme moi tu préfères la théorie des satanistes, l'Ouroboros s'inocule son propre venin pour s'assagir lui-même par l’absorption des connaissances fondamentales de toutes choses et de toute vérité. Il est parfois représenté avec un pentacle en son centre pour renforcer le caractère du cycle éternel par l'esprit sur la pointe Nord et les quatre éléments sur les autres pointes.

Je me passe le revers de la main sur le front tandis que je continue au mieux :

Dans l'idéal, j'aimerais que les membres du gang portent l'Ouroboros en  signe distinctif. Je pense que cela nous représente parfaitement, et pour parachever la structure de cette œuvre, j'envisage de me baser sur les caractéristiques de cette créature mythologique, en nous donnant comme nom "The Eternal Snake".

Je souhaite que nous incarnions la connaissance du monde, et que chacun de nos actes soit un véritable casse-têtes pour ceux qui n'auront pas la chance de faire partie des nôtres.

Le fil de ma réflexion étant terminé, je tombe à nouveau en son pouvoir de séductrice. Je penche légèrement la tête, le regard non plus dans le sien, mais clairement sur sa poitrine.

...Qu'en penses-tu ?

Je mets quelques secondes pour sortir de ma langueur, mes premières paroles dépassent mes pensées tandis que je lève les yeux au ciel :

Caramba !

Lorsque je m'en rends compte il est déjà trop tard, la beauté fatale me gratifie d'un sourire à tomber parterre.

Désolé, je vais finir par m'habituer à ton charme, enfin, je crois...

Je lui rends son sourire, puis je reprends pleinement conscience de l'instant présent.


Tu me comprendras Carmen, je suis certes un génie incompris lorsque j'émets des théories, mais lorsque je donne des missions, je suis limpide comme de l'eau de roche.




Mais tu as raison et tu as plutôt intérêt de me dire tout ce que tu penses. Je souhaite que nous soyons soudés.


Son regard de flamme suite  à ma dernière phrase me fait revenir sur mes propos avec un large sourire :  

Enfin, pas trop non plus à défaut de quoi je ne saurais plus réfléchir.

Puis lorsque je tourne la tête je semble soudain comprendre qu'elle a su me faire oublier mon environnement crasseux. Je ferme les yeux quelques secondes et je deviens un autre homme. Oublié l'effet du charme, je me tiens droit et je marche vivement à travers la pièce, envoyant le peu de meubles et de chaises pourries au sol. Mon autorité naturelle reprend le dessus :

On me vire toutes ces merdes, ce qui peut être transporté sans encombre doit être hors de ma vue, le reste doit être brisé et brûlé. Je veux que ça brille. C'est valable pour tous les étages et l'ensemble des planques. Je serai intraitable sur la propreté des lieux.

L'environnement qui nous entoure agit directement sur notre capacité à réfléchir et à être efficace.

Je donne un coup de talon sec sur le dossier d'une chaise au sol dont le bois pourri se casse immédiatement. J'éventre ensuite sur toute sa longueur un canapé qui ne me plait pas, avec le couteau de Virginia.




Je reviens vers Carmen le regard médusé par ma vivacité de réaction face à mon environnement.


Je me sens déjà mieux. Ce sera assez clair pour les hommes que tu as amené avec toi ? Il nous faut de quoi respirer, un espace vide et clair dans l'immédiat sera déjà magnifique par lui-même.

J'ai plusieurs idées d'aménagement, mais je laisserai libre cours à ton imagination, je ne suis pas un tyran. Les idées féminines me plaisent en général.

J'ai passé ma nuit la plus étrange de mon existence, je n'ai pas pour habitude de rêver à une autre femme que la mienne. Je maudis Ellen de m'avoir mis une créature divine sous la main.

En arrivant je me doutais que les hommes auraient bien avancé étant donné que je les ai observé travailler pendant une heure ; mais je ne m'attendais pas à ce que toute la décoration soit terminée.

Je contemplais les vivariums de la pièce principale lorsque les talons de la responsable de ma nuit agitée, me font me retourner. Je la gratifie d'un sourire avant de la suivre dans mon nouveau bureau. Son immensité fait passer au rang de ridicule celui du NYPD.

J'admire mon nouvel environnement comme un enfant que l'on couvre de cadeaux. Mon cerveau a beau avoir évolué trop vite, mon cœur reste celui d'un jeune adulte.

Je peux sentir le regard de Carmen dans mon dos qui se réjouit d'avoir touché où il fallait. Je m'installe à mon bureau et regarde le python royal à travers le verre.


Je mets un fond sonore sur l'iMac avant me diriger vers un des nombreux vivariums de la pièce. Je détaille les races de serpents qui s'y trouvent et déverrouille une trappe pour en sortir un jeune boa constricteur que je mets autour de mes épaules.

Je rejoins ma future bras droit et lui offre un large sourire avec un regard pénétrant :

Tu m'avais caché ton petit secret Carmen, j'ignorais que tu étais mentaliste. Cela me convient pleinement, je ne regrette pas de t'avoir laissé carte blanche pour la déco. Il me tarde de découvrir ton propre jardin secret.

Je laisse mon nouveau compagnon s'enrouler légèrement autour de mon bras pour approcher sa tête de la main de Carmen.

Je tourne la tête vers mon bureau avant de la fixer à nouveau avec un regard amusé en caressant la tête du serpent. Clairement, elle me drague en utilisant le vouvoiement :  

Rappelle-moi d'emporter tout le matériel de sécurité nécessaire si je devais explorer cette fameuse antre plus sombre que cette pièce. Il serait dommage que  je trébuche accidentellement et abîme ce corps que j'ai   sculpté dans la douleur, 4 mois durant, avant notre rencontre d'hier.

On se taquine mutuellement, et la bonne ambiance entre un Chef et son Bras Droit est primordial. Je sais que son charme influe beaucoup sur mes paroles, ce n'est pas dans mes habitudes de m'amuser. Ceci dit depuis ces derniers mois j'ai énormément souffert psychologiquement de la séparation d'avec Sam et Dean, mais aussi de ne plus être en contact avec l'équipe AG. Aujourd'hui je ne suis plus seul contre tous, je me sens soutenu et cela me fait énormément de bien.

Je réagis à propos du bureau :

J'ai souvent travaillé en étant assis sur une table, je comprendrais que tu t'y installes à ta guise pour travailler. Tu es un peu chez toi ici, prends tes marques et tes aises, nous n'en serions que plus efficaces.

Je vais remettre le serpent à sa place tandis que je me dirige à nouveau vers le bureau. Je souris en fixant le verre qui le compose :

J'imagine que tu as pris soin de renforcer le verre pour éviter d'éventuels accidents et que l'un ou l'autre ne serve de nourriture pour le python royal sagement endormi ?

Je m'assieds sur le bord du bureau et sors un bloc à dessin ainsi que des crayons et feutres neufs :

Si je n'avais pas choisi la voie empruntée par mon père, j'aurais voulu être artiste pour reproduire des paysages et faire des portraits.

Je l'invite à me rejoindre d'un signe de tête :

Savais-tu que tous les portraits-robots qui ont circulé dans  tout New York durant toutes ces années n'étaient pas faits par le programme spécifique du NYPD mais étaient tous mes propres coups de crayons ?

Je profite du moment de calme pour discuter de tout et de rien avec elle, il est important que nous continuions à  apprendre à nous connaître pour éviter la moindre bavure par la suite.

Il est évident qu'elle savait qu'en prenant place dans le fauteuil juste en face de moi, j'aurais un visu direct sur ses cuisses. Je tente de feindre l'indifférence, en changeant de musique d'un geste, sans la quitter du regard pour autant. Malgré tout, je ne peux qu'avaler discrètement ma salive.

Je réponds à sa question tandis que je fais quelques coups de crayons vifs sur le papier à dessin. Je dessine sans regarder ce que je fais, ou presque, mon poignet est guidé par la créature que je dévore des yeux :

Je n'étais pas un Directeur comme les autres, si les tâches administratives, comptables et juridiques prenaient du temps à gérer, je restais à mes yeux un membre à part entière de l'équipe AG.

J'ai eu la chance d'être doté d'un cerveau multitâches, on m'a souvent comparé à une machine et un bourreau, en m'infligeant plus de travail que de raison. Seule la volonté compte.

J'ai besoin d'être  très proche de mes hommes, et je les décharge au maximum pour qu'il aient du temps libre. C'est vrai j'ai sacrifié beaucoup de week-end en famille. Aujourd'hui qu'ils sont loin de moi et que je ne peux pas les voir, je regrette un peu d'avoir donné tout ce temps à New York qui ne me le rendra pas. Mon fils va bientôt se faire opérer de ses blessures, ce jour là, même si je dois rester invisible aux yeux de tous, j'aimerais être présent.

Tandis que je parle mes coups de crayons sont de plus en plus précis. Je lui souris avant de terminer :

Tu sais pas mal de choses de moi maintenant. Et toi Carmen, qui es-tu ? Quel genre de bras droit m'a-t-on conseillé ?

J'attrape des feutres pour rendre le dessin réaliste. Et je le fais glisser sur le bureau face à elle. Tandis que je parlais je l'ai reproduite trait pour trait, dans les moindres détails y compris les plus intimes.

Mon sourire s'efface à mesure qu'elle se dévoile, toutefois, je refoule mes émotions pour ne laisser apparaître qu'un masque impassible. Je descends du bureau pour venir m'installer dans le fauteuil à côté du sien. Je le fais pivoter pour la regarder droit dans les yeux :

Ma question était maladroitement posée, je voulais simplement connaître tes talents et tes limites. Mais je te remercie de ta franchise Carmen, ton récit me permet d'admirer tes atouts que nous mettrons en avant ensemble.

Nous avons chacun nos histoires plus difficiles les unes que les autres, mais nous devons être capables d'utiliser nos faiblesses à notre avantage. Il n'y a pas de place pour les faibles en Amérique. Nous sommes ce qui nous a forgé, mais toi comme moi, nous savons que personne ne nous arrêtera dans notre entreprise.

Je me lève lentement, puis me place dans son dos. Je pose fermement mes deux mains sur ses épaules avant de me pencher à son oreille pour lui murmurer :

Aide-moi à mettre New York à feu et à sang, et je te ferai reine de toute l'Amérique.

Je nourris des rancœurs depuis des années, je manque de Puissance et je n'aspire qu'à devenir un véritable marionnettiste des plus cruel.

Un large sourire se dessine sur mon visage lorsqu'elle me dit qu'elle a déjà mis le Mexique à feu et à sang plusieurs fois. Bien j'ai affaire à une experte en la matière, la partie n'en sera que plus plaisante.

Je fais pivoter sa chaise en plantant un regard mi-sadique, mi-pervers dans le sien, je lui attrape le menton entre mon pouce et mon indexe et approche mon visage du sien :

On cogne là où ça fait mal. Et les Sadovski ne jurent que par l'argent de leurs casinos.

Je n'en dis pas plus sur ce point pour le moment, je sais qu'elle suit le fil de mes pensées.

Je reproduirais de tête la carte de New York dont dispose le NYPD, avec l'emplacement des casinos des ruskoff. J'ai ma petite idée d'où et de quelle manière je compte frapper dur.

Lorsque l'on parle des projets que j'ai pour New York, je ne suis plus celui que tout le monde a connu. Je crois que ma propre cousine ne s'imagine pas ce que je réserve à la Big Apple. Enfaite non, j'en suis certain. Je suis le pire de tous.

Je viens chercher sa main pour la lever du fauteuil sans quitter son regard. la main gauche dans le creux de ses reins comme pour danser le tango qui se joue en fond sonore,  je lui souris :

Mais n'allons pas plus vite que la musique, avant toute chose je dois faire connaissance avec mes hommes. Ce sont ceux que tu m'as amené pour le déménagement et l'aménagement n'est-ce pas ? Il doivent être arrivés.

Elle fronce les sourcils quand tu te permets de prendre son menton entre tes doigts. Elle se lève à ta dernière question, ouvre une vitre du vivarium et attrape un serpent fin et vert pomme. Toi qui a passé tes nuits à potassé sur les serpents, tu reconnais un Mamba vert. Un serpent dont la morsure suffit à tuer un homme en quelques minutes. Le poison attaque le système nerveux et les toxines le cœur.

Carmen le prend avec délicatesse et le laisse s'enrouler autour de son bras avant de lui embrasser doucement la tête. Le reptile sort sa langue plusieurs fois et observe les alentours.

Allons les voir, t'invite t-elle.

Tu arrives dans la pièce, où trois hommes bruns sont présents :

Voici Angel, Pedro, et Marcello. Ce sont mes hommes de confiance. Ils sont spécialisés dans les assassinats. J'ai pensé que tu souhaiterai leur parler avant de faire entrer les autres ici.

Les hommes sont stoïques, bien qu'ils te regardent. Tu décèles chez eux le manque de confiance en toi. Ils ne te connaissent pas mais ont suivi Carmen car elle est leur leader.

Je vois que je ne suis pas le seul à rapidement m'adapter avec nos compagnons rampants. Je la suis et remarque immédiatement que les hommes se méfient de moi parce que je suis inconnu à leurs yeux.

J'incline la tête pour les saluer. D'emblée je tente de faire baisser leur garde en instaurant un climat d'une simple rencontre sans le moindre signe de hiérarchie, malgré la présence naturelle de mon charisme. C'est donc en espagnol que m'adresse à eux :

Messieurs. Soyez les bienvenus chez vous. Je suis Bryan, je serais ravi de vous inviter à vous joindre à moi pour pendre la crémaillère de ce lieu que vous avez aménagé à merveille en une seule journée.

Bien sûr il y aura le repas classique, mais ce n'est pas tout. Je vous propose que New York participe à ces festivités.

Je porte tour à tour mon regard sur chacun d'eux, en espérant que leur méfiance envers moi s'amenuise au fil de mes paroles.

Ou plutôt les subissent. Je vous offre la possibilité de voir les choses en grand, l'alcool coulerait à flot, et puisque vous êtes des spécialistes des assassinats, le sang pourrait couler en abondance.

Je reste sérieux tout le long, il n'y a pas une once de raillerie dans ma voix  :

J'ai échangé quelques idées avec Carmen, qui seraient susceptibles de vous plaire, et surtout de vous permettre de continuer à vous faire la main dans votre domaine favoris.

Je presse un point sensible des assassins de métier. Mon but est de faire tomber les barrières le plus rapidement possible sans avoir à user de mon charisme.

Je ne me laisse pas démonter par leur absence de réaction, et je me vends comme si les rôles étaient inversés et que c'était moi qui passais "l'entretien d'embauche".

En me rejoignant je vous offre Staten Island en guise de bienvenue pour que nous y régnions en Maîtres. Nous aurions la mainmise sur les trafics maritimes, Staten Island est une plaque tournante inévitable.

En me rejoignant, je ne vous ferais pas vivre le fameux rêve américain, je vous offre le pouvoir de faire connaître le cauchemar mexicain à cette ville.

Les américains ne vous ont jamais permis de fouler leur sol comme bon vous semblait, sans risquer de vous faire reconduire à la frontière dans le meilleur des cas ?

Je sors ma carte verte attestant de ma nationalité américaine que je jette sur l'une des tables près d'eux.

Rejoignez-moi et je vous offre un sésame définitif vous permettant de circuler où bon vous semblera dans toute l'Amérique.

Je ne montre rien tandis que je scrute le moindre semblant de réaction corporelle. Plus je parle et plus mon charisme s'amplifie pour embaumer la pièce afin qu'ils ne pensent pas que je suis un guignol beau parleur :

Vous avez toujours rêvé de rouler dans des bolides derniers cris ? Je vous les apporte sous le sapin au réveil.

Je marque un temps d'arrêt avant de reprendre :

De l'argent ? Des femmes ? Des jeux ? Autre chose ?...Frottez la lampe magique et je réalise tous vos souhaits les plus chers.

J'espère avoir un peu plus attiré leur attention, maintenant qu'ils savent que j'ai le bras suffisamment long pour leur offrir tout ce que je viens de lister.