Episode 1 : Russian Roulette & L'équipe Anti Gang [Bryan et Randall]

Je décide de faire mon entrée dans la salle de réunion pile au moment où un candidat énonce une théorie concernant un cliché de l'affaire de l'incendie d'une salle de jeux. Je note que l'ambiance qui était plutôt décontractée en mon absence, s'est particulièrement tendue. Sans doute mon entrée qui n'a pourtant rien de théâtrale, vient-elle de mettre fin aux échauffements avant le véritable match intellectuel.

Sans que cela ne se voit sur mon visage, j'enregistre la moindre réflexion donnée par le candidat en question. J'englobe d'un simple regard les nouvelles têtes et me remémore par là même chacun des dossiers de candidatures. Aussi je me souviens rapidement que le candidat qui vient de prendre la parole est Randall Raines.

Je laisse le poids du silence se faire après les quelques réflexions des autres candidats et vais rejoindre O'Malley qui est assis, comme à son habitude nonchalamment sur la table. J'échange une brève poignée de main avec lui tout en le saluant :

Capitaine Winchester.

Puis je me tourne afin de faire face à tous les candidats après avoir posé les dossiers sur la table derrière moi :

Bonjour à toutes et à tous. Je suis Bryan Summer, Directeur du NYPD, et voici l'Officier Lucie Del Sol, membre de l'équipe Anti gangs.

Je laisse le charme de Lucie faire effet avant de poursuivre :

Je vais reprendre la main de vos évaluations que le Capitaine Winchester avait commencé. Nous allons d'ailleurs reprendre sans tarder.

Je ne prends pas la peine de me retourner pour revoir la scène que j'ai vu des centaines de fois depuis ce matin, puis j'embraye en plongeant mon regard intense dans celui de Randall Raines :

Il semblerait que l'affaire que vous avez sous les yeux vous ait inspiré un casse maquillé en règlement de comptes, Monsieur Raines. Pourquoi pas, poursuivons dans la droite ligne de votre réflexion en y ajoutant un peu de concret.

Je place mes mains dans mon dos et fais quelques pas dans la salle, comme le ferait un professeur :

Des hommes probablement armés entrent dans la salle de jeux dans le seul but de faire de la casse, brisent le matériel qu'ils ont à portée de main, tentent de défoncer la porte blindée avec digicode, sans succès a priori. Ils entreprennent de disposer des corps ça et là, comme vous dites, quelques dizaines soit dit en passant, dont celui près de la porte blindée, visiblement mutilé. Les hommes brûlent la salle de jeux et s'en vont les mains vides avec pour objectif de faire penser à un règlement de comptes.

Je m'arrête devant le candidat intéressé et esquisse un léger sourire :

Le décor étant planté, plusieurs questions se posent, Monsieur Raines. D'où proviendraient les corps qui auraient été disposés ça et là selon vos propos ? La salle de jeux aurait été prise d'assaut durant la fermeture si aucune des personnes carbonisées étaient présentes au moment du supposé casse ? Dans un tel cas, à combien estimeriez-vous le nombre de véhicules qui auraient été utilisés pour le transport des corps ?

Mon objectif n'est pas de le coincer mais bien de le faire réfléchir et de rectifier éventuellement quelques points de son raisonnement en rebondissant sur mes questions. A moins qu'il ait une théorie pour y répondre très clairement.

Je n'eus pas de réponse de ce cher O'Malley, puisque ce dernier fût interrompu par l'arrivée du très médiatique directeur du NYPD Bryan Summer, qui n'est plus à présenter pour personne mis à part pour certains badauds présents dans la salle qui doivent être stupéfaits par le charisme qu'il dégage mais aussi par son jeune âge.

L'atmosphère devint tout à coup pesante, O'Malley passerait pour un pantin à côté de lui mais il semble figé sur ma personne comme si mes impressions avec O'Malley étaient les bonnes, j'avais attiré leur attention et n'était pas loin de toucher au but mais quelque chose me dit qu'il va chercher la petite bête et se montrer pointilleux.

Je ne me trompais pas j'eus le droit à une avalanche de questions qui ne faisaient qu'asseoir sa supériorité sur le reste de l'assemblée et sa maitrise de la situation en toutes circonstances.
Non sans courage je n'allais pas me laisser dérouter et je répondis presque aussitôt à ses interrogations :

"Il n'y a eu aucun véhicule que ce soit du fait que les victimes étaient sur place, pour la bonne et simple raison qu'il pourrait s'agir d'une salle de jeu clandestine échappant à toute autre influence, comme celle de la famille russe venant imposer son leadership depuis peu dans notre chère ville".

Je continuais mon propos qui était loin d'être clos :

"Ceci amenant cela les malfaiteurs ont mis à sac la salle de jeu clandestine et fait des victimes au hasard pour nous mener vers d'autres théories plus loufoques les unes que les autres, et le patron doit être la victime avec les yeux hors des orbites, histoire de bien faire passer le message aux autres patrons qui auraient la folie d'être clandestins de se soumettre au joug de ces nouveaux oligarques".

Ainsi s'acheva ma rhétorique mais mon calvaire ne va pas se finir de si tôt à mon humble avis mais après tout il en va de ma carrière et elle serait des meilleures aux côtés d'un tel personnage.

Je reste silencieux durant tout le développement de mon interlocuteur qui défend son idée bec et ongles. Mon silence pèse lourd dans la salle de réunion, aussi je détends l'atmosphère en réduisant à quelques effluves le charisme naturel qui émane de moi avant de hocher simplement la tête :

C'est une théorie qui pourrait être soutenue dans le cadre des prémices des réflexions qui pourraient être menées sur un tel dossier dans cette salle même, au cours d'une réunion de l'équipe AG.

Je ne laisse pas encore ne serait-ce que planer l'idée qu'il s'agit effectivement d'un des dossiers avec lesquels je suis arrivé. Ce qui va suivre aura de quoi déstabiliser le candidat sur lequel j'ai mis mon grappin. Oui j'ai une mémoire hors du commun et connais tous mes dossiers par cœur.

Cependant, votre sens de la réflexion ne me satisfait pas complètement. Je crois savoir qu'au sein du département de génie électrique et informatique du Massachussetts Institut of Technology, on vous a appris à n'exclure aucune piste pour aboutir au bon code informatique vous permettant de résoudre des bugs auxquelles les machines seraient soumises. Lorsqu'il s'agit de régler une affaire judiciaire, c'est exactement la même chose, si ce n'est encore plus important.

Ma réflexion sonne comme une réprimande, comme un coup de règles sur les doigts d'un élève ayant commis une erreur de débutant. Avant de poursuivre, je fronce les sourcils suite aux rires contenus et d'autres moins, de la part des concurrents de Randall.

Le charisme que j'avais réduit a minima remonte en flèche faisant tomber un malaise dans la pièce dans le but d'écraser les ricanements. Je jette un simple regard en direction des responsables avant de m'adresser à nouveau à mon interlocuteur :

Lorsque le Capitaine Winchester vous a présenté le premier cliché, il vous a certainement posé une question a priori simple en ces termes approximatifs : "gangs, pas gangs, accident ?" Suite à cela vous vous êtes probablement divisés en deux groupes "gangs, pas gangs". C'était là un piège basique qui vous a été tendu.

Je retourne aux côtés d'O'Malley et de Lucie avant de m'adresser à tous les candidats :

Quel que soit le peu d'éléments qui sont à votre disposition, lorsque ce genre de question vient à vous être posée, on ne vous demande pas de prendre partie, mais d'émettre toutes les hypothèses envisageables. En l'espèce vous auriez tous dû vous demander pourquoi ce serait le fait d'un gang, pourquoi ça ne le serait pas, comme Monsieur Raines a commencé à émettre quelques idées intéressantes , et pourquoi cela n'était pas un simple accident, ou inversement.

Puis je continue en donnant des éléments complémentaires et non des moindres :

Enfin, l'affaire dont vous avez eu quelques clichés sous les yeux fera l'objet d'un dossier que l'équipe AG devra résoudre dès cet après-midi à l'issue des évaluations. Seuls ceux d'entre-vous qui me soumettront les réflexions les plus pertinentes auront l'occasion de participer aux investigations de l'équipe AG dont ils feront partie intégrante.

La bombe est lancée. Ce n'est pas une séance d'échauffement, à l'issue des évaluations, seules quelques personnes intégreront l'équipe AG. Je n'en donne pas le nombre, que je n'ai d'ailleurs pas défini.

Afin de vous donner quelques éléments supplémentaires concernant cette affaire, elle a été commise dans le courant de l'après-midi de samedi dernier, dans les quartiers du Bronx.

J'ai un regard pour Randall lorsque je donne l'ultime élément pour le moment :

Le casino appartient à la famille Sadovski.

Puis comme un jury d'examen écrit :

A vos neurones.

Mon regard se fixe sur le candidat qui a pris la parole en dernier. Une lueur illumine mon regard l'espace d'une demi seconde à peine. C'est un sérieux concurrent pour Randall. Je m'apprête à lui répondre lorsque je sens O'Malley distrait. Je suis la direction de son regard, et lorsque j'aperçois la personne qu'il fixe, mes mâchoires se crispent imperceptiblement. Je me penche à son oreille afin de lui murmurer :

Qu'est-ce qu'elle fait ici celle-là ? Arrange-toi pour qu'elle ne décide pas d'entrer. Ou je la crucifie sur place. Qu'elle attende la pause déjeuner.

Puis comme si je n'avais jamais quitté le fil de sa théorie mon regard se porte sur mon interlocuteur :

Si je suis bien le fil de votre réflexion, Monsieur Fox, les Sadovkis se seraient soudainement attirés les foudres des Niners en omettant ou refusant de payer à ces derniers une taxe de protection qui leur aurait été imposée. Ou bien que le NYPD aurait un indic Sadovski qui m'aurait permis de faire tomber plusieurs planques et cargaisons de drogues et d'armes. C'est une hypothèse qui pourrait se tenir mais dont je ne comprendrais pas plus que vous la soudaineté d'une telle attaque, à supposer qu'elle soit le fait des Niners. Restons prudents, il pourrait tout aussi bien s'agir d'une attaque d'un autre gang pour nous conduire sur leur piste du seul fait que cela se soit produit dans le Bronx.

Ceci dit, vous mettez le doigt sur l'une des zones d'ombres de ce dossier que j'ai pu relever. En supposant qu'il s'agisse bien des Niners, avec le nombre de saisines de cargaisons dont le gang en question a fait l'objet ces derniers mois. Ne pensez-vous pas que les Sadovskis en auraient fait les frais bien plutôt que ce samedi ? Si tant est que le NYPD ferait appel aux services d'un indic appartenant à la famille russe, le fait que l'attaque du casino intervienne justement ce jour-ci ne parait-elle pas un peu grosse pour intercepter un indic ?

Il se pourrait effectivement qu'il s'agisse d'un avertissement, mais sommes-nous face à une simple affaire financière entre gangs ? D'autres éléments dont je vous ai fait part indirectement ne pourraient-il pas nous ouvrir également une piste à laquelle vous ne semblez pas avoir pensé ?

J'attends un moment avant de poursuivre. Je les laisse tous réfléchir aux éventuelles pistes que nous pourrions explorer, outre celle-ci, qui est somme toute intéressante.

Depuis l'arrestation de l'ancien Directeur du NYPD, Paul Staer, qui n'était autre qu'un infiltré des One Niners et l'affaire de la Nostrand Station Avenue ayant causé la mort du Capitaine Dean Summer, je me méfie des gangs, tous autant qu'ils sont. Faire appel à un indic pourrait me mener à ma propre mort.

Mes équipes sont composées d'hommes aux compétences diverses et variées que j'exploite à leur paroxysme pour prendre les gangs à contre-pieds.

Toutes les questions que j'ai posé intéressent l'auteur de la théorie qui les a soulevé, mais également les autres candidats.

Je sens vraiment que Bryan veut imposer son autorité à la salle, et montrer à tous que celui qui tient les ficelles est bien lui même.
Il ferait même penser à un empereur donnant ses directives à ses autres consuls pour mener à bien les opérations.

Sans tomber dans la caricature, j'écoute avec attention ce dernier qui ne fait qu'un empilage de réprimandes envers ma personne, mais il semble vouloir me mettre sur la bonne voie, aurait-il déjà arrêté son choix ? je ne le pense pas au vu des rires fusant dans la salle concernant ma théorie, mais cette euphorie passagère retombe aussitôt sous le regard assassin du sieur Summer.

Après avoir écouté ses propos dithyrambiques au sujet de sa comparaison entre justice et informatique et la marche à suivre pour mener une enquête le voile est enfin levé sur le nom de la famille russe : les Sadovski, la pièce manquante du puzzle venait de faire surface.
De plus le crime a eu lieu dans le Bronx ce qui n'est pas sans rappeler un étroit rapport avec le gang des Niners.

Je voulus m'exprimer pour étayer mes propos quand mon regard croisa celui de Lucie, qui soit dit en passant a un charme dévastateur, il semble y avoir une attirance mais je décide de ne pas me faire submerger par des pulsions quelles qu'elles soient, après tout je suis à un entretien d'embauche pas à une séance de speed dating.

Ce manque d'attention eu la conséquence de mettre en lumière un adversaire de taille pour moi en la personne de Matthew Fox qui présenta une toute autre théorie que la mienne et certains points noirs du dossier devenaient soudain plus clairs.
Bryan semblait avoir jeté son dévolu sur cet homme, et malgré sa relative distraction quant à une femme rousse de passage, je décidais de rebondir sur les propos de Fox :

"Votre théorie est fort intéressante mon cher et met en figure de proue de très bon éléments notamment concernant le Ministre de la Défense néanmoins ne croyez vous pas que cela paraît trop simple ? Ici on postule pour l'anti gang et non pour un casting de série télévisée de seconde zone"

J'arrête net mon propos et m'adresse les yeux dans les yeux à Bryan :

"Mr Summer je resterai sur ma théorie de départ à savoir un mélange entre réalité et mise en scène, à savoir que même si le casino est la propriété des Sadovski, j'ai l'intime conviction qu'ils ont mis à sac leur propre établissement dans le but de mettre le feu aux poudres, et attirer l'attention sur les Niners puisqu'il est ici question de leur territoire, et ce dans le but précis d'assassiner ou de commanditer de très près et tranquillement la liquidation de feu le Ministre de la Défense."

Ainsi s'arrêtait ce qui je l'espère serait ma dernière intervention, car la journée dans une salle de réunion n'est pas des plus passionnantes comparé au terrain bien plus enivrant pour sa part.
Mon sort ne semble plus m'appartenir et la sentence devrait tomber sous peu et comme il est coutume de dire, que le meilleur gagne !!!

Je ne réponds pas immédiatement au surenchérissement de Matthew, laisse une ultime chance aux autres candidats de se manifester et ainsi remettre en cause ma décision qui semble s'imposer. Lorsque j'entends Randall se prendre au jeu en retoquant une partie de la théorie de son conccurent, un sourire se dessine sur mes lèvres.

A l'instar d'O'Malley, je m'assieds sur le rebord de la table en croisant les bras sur ma poitrine, ce qui est extrêmement rare venant de ma part. Je prends la parole en répondant d'abord au dernier candidat ayant pris la parole, à savoir Randall Raines. C'est sur le ton de l'amusement que je m'exprime :

Vous n'êtes pas du genre à changer d'avis aussi facilement Monsieur Raines n'est-ce pas ? Je ne sais pas d'où vient votre conviction, mais les personnes qui défendent leur point de vue jusqu'au bout de manière étayée, j'aime ça.

Je garde le silence quelques secondes, me passant la main dans ma barbe naissante :

Néanmoins, vous n'avez pas votre place dans la salle de réunion de l'équipe AG. J'ai besoin de personnes capables de me soumettre toutes les pistes possibles.

La tension monte, je peux sentir le stress du candidat concerné :

En revanche, votre personnalité devrait convenir au Capitaine Winchester, sur le terrain. Je retiens votre candidature, le Capitaine aura l'occasion de tester vos compétences physiques et psychiques sur le terrain.

La tension retombe, je viens de retenir une candidature, mais serait-ce la seule ? J'embraye ensuite sur un ton cassant pour répondre à Monsieur Fox, montrant bien qu'il n'est pas membre du NYPD et qu'il n'a pas à se mêler des dossiers confidentiels :

Concernant votre question relative à l'assassinat de feu le Ministre de la Défense, Monsieur Fox, vous l'avez soulevé vous-même il s'agit d'un dossier classé confidentiel.

Tandis que je soutiens son regard de manière très intense à lui en faire baisser la tête je reprends :

Je répondrai à cette question lors de la réunion officielle de l'équipe AG au cours de laquelle vous aurez l'occasion d'entendre tout ce que je pense de ces deux dossiers. Je retiens également votre candidature.

Puis je me lève et reprends un air complètement impassible :

Bien. Les évaluations sont terminées. Pour celles et ceux qui n'ont pas été retenus, ne perdez pas espoir. Dites-vous que si votre candidature n'a finalement pas été retenue, c'est parce que vous manquiez de hargne pour imposer vos idées, cela se travaille. Je ne ferme pas définitivement les recrutements.

Vous pouvez sortir.

Je fixe les deux personnes retenues :

Sauf vous deux. Vous prendrez votre service dès 2.00 p.m. L'Officier Del Sol va vous conduire aux vestiaires afin que vous puissiez trouver des tenues à votre taille. Le Capitaine Winchester vous rejoindra très bientôt.

Je m'adresse ensuite à Lucie :

J'ai beaucoup de dossiers à potasser Lucie, je te laisse les commandes de la réunion de cet après-midi, je vous rejoindrai avec un peu de retard. Tu commenceras par le dossier que tu préfères, je traiterai les deux simultanément de toutes manières.

Je m'arrête de parler, et vais me servir un café avec ma cafetière préférée au fond de la salle de réunion. Je feuillette les dossiers que j'ai récupéré, un instant puis, comme si je venais de me rappeler que je n'étais pas seul :

Vous pouvez y allez. Bon appétit.

Lorsque tout le monde sera sorti, je me rendrai au bureau d'O'Malley.