Episode 5 : La mue du Serpent [Bryan]

Je hausse un sourcil lorsqu'elle me surnomme Samael Junior. Je récupère ma chemise que j'enfile en ne fermant que les premiers boutons. J'empêche la fermeture des portes de l'ascenseur d'un bras en lui adressant un léger sourire.

En remontant à l'appartement je n'ai qu'une envie, c'est de prendre une douche glaciale. Si cela ne me venait pas à l'idée par moi-même, je sais que Carmen m'y trainerait de force.

Je retourne dans le salon vêtu d'une simple serviette autour de la taille. Je m'installe en face de mon bras droit avant saisir grand verre d'eau qu'elle a pris soin de me servir, je bois une longue rasade après l'avoir levé à son attention :

C'est vrai qu'il fait vraiment chaud en bas, je vais devoir réguler la clim.

Je plonge mon regard bleu profond dans le sien. Toutefois ce n'est pas mon regard froid habituel depuis près de 7 mois que nous vivons sous le même toit. De la peur se lit dans mes yeux. Je reste silencieux tandis que je garde la face devant mon bras droit. Mais j'ai besoin de parler, elle a toujours lu en moi comme dans un livre ouvert.

J'ai surtout attrapé une manie, qui est de toucher mon alliance dès que je m'apprête à faire quelque chose qui peut avoir de lourds dommages collatéraux, touchant ma famille.

Je lui adresse un sourire et termine mon verre avant de tenter vainement de détourner le sujet, c'est trop tard :

Tu as passé une bonne soirée ?

Je prends une profonde inspiration que j'expulse immédiatement. Je ne quitte pas ses yeux noirs lorsque je lui dis ce que j'ai sur le cœur :

Il y a 6 ans, juste avant de partir sur le terrain avec l'équipe anti gang dont mon père était le Capitaine, et qui fût sa dernière mission avant de mourir sous mes yeux de la main de Bastian Farlos ; mon père avait remarqué que je m'étais entiché de l'avocate de l'équipe, qui est devenue ma femme depuis. Il avait tenu à me mettre en garde qu'en me mettant en couple je me tirais une balle dans le pied tout seul face aux gangs. Elle serait mon point faible.

Elle ne craignait rien puisque je jouais un double jeu entre le NYPD et le Pacte. Mais aujourd'hui je ne fais plus partie ni de l'un, ni de l'autre. Toute l'Amérique le sait, je suis invulnérable, je brave tous les dangers et je n'ai peur de personne. Il n'y a qu'un seul moyen de m'atteindre, s'en prendre à ma famille.

Je me passe les mains dans les cheveux, signe que je suis fragile sur ce sujet.

Même si je leur ai assigné les meilleurs agents du NYPD pour assurer leur sécurité depuis l'enlèvement de Dean Jr, la guerre ouverte qui a éclaté les met au devant de la scène. Le NYPD ne pourra rien faire et subira lui aussi les dommages collatéraux. Je dois les envoyer loin de New York, même s'ils ne comprendront pas comment je peux agir tout en étant invisible à leurs yeux.

J'ai demandé à O'Malley de convaincre sa sœur de quitter New York, mais elle ne voudra pas partir sans moi, à moins qu'elle sache ce que je suis devenu, et encore.

Je me passe une main sur le visage avant de souffler :

Désolé de t'ennuyer avec ça, même si on est censé tout se dire, pour le coup je ne suis pas si intouchable que ça.

J'aurais bien du mal à faire passer cette confidence pour un ordre, bien que cela ne semble pas la déranger outre mesure, à ses yeux un chef de gang fait ce qu'il veut. Je ne suis plus le gentil Bryan, certes mais j'ai aussi besoin de relations extérieures aux affaires, bien que mon statut plane toujours derrière.

Je me redresse me me frotte l'arcade sourcilière droite :

Bien plus qu'un ordre Carmen, c'est un service exceptionnel que je t'ai à te demander, entre toi et moi. Le meilleur moyen que j'ai pour les protéger c'est de les envoyer en Sicile par jet privé. Je dois les loger tout le temps nécessaire pour éliminer le danger à New York. J'ai besoin de ta Villa et de tout ce qui te permet de passer des vacances parfaites, tous frais payés. Je te paierai tous les frais que leur séjour te coûtera.

Il leur faudra une escorte que je paierai comme mission exceptionnelle. Il est évident que les hommes devront s'arranger pour ne pas être vus, comme ils savent le faire. L'équipe d'O'Malley se changera de l'escorte officielle en civile.

Pour le jet, tu devrais pouvoir mieux te débrouiller que moi avec Ellen, je pense. Tu as toute ma confiance Carmen, je mets entre tes mains la vie de ce que j'ai de plus cher au monde.

Je me passe la langue sur les lèvres avant de terminer :

Mes points faibles protégés des dommages collatéraux, nos actes seront sans limite. Nous ne resterons pas passifs dans cette guerre, je compte bien être l'un des acteurs principaux, et de t'offrir ce que je t'ai promis.

Tout ce qu'elle dit est vrai. Elle n'est pas n'importe quel bras droit, elle est celui qu'il me fallait. Mon visage n'exprime pas grand chose, en revanche mon regard est toujours aussi expressif. J'acquiesce silencieusement avant de me lever en prenant appui sur mes cuisses.

Je resserre la serviette autour de ma taille avant d'aller passer mon indexe sur les doux visage de Sam et Dean Jr sur l'un des cadres posé sur le meuble devant moi.

Tu as raison sur toute la ligne Carmen, parfois je préfèrerais qu'ils soient  tous les deux de simples poupées, je passerais de meilleure nuits et je pourrais les transporter partout avec moi sans craindre qu'ils puissent être kidnappés ou assassinés. Dean Jr a subi du haut de ses 5 ans les pires sévices qu'un homme adulte aurait du mal à supporter. Ce ne sont que les souffrances qui sont apparentes, il en a certainement d'autres invisibles.

Je prends quelques secondes avant d'enfouir mes sentiments au plus profond de moi-même. Avant de me retourner un masque dur sur le visage :

Quoique je pense ou dise, il n'y a que par nos actions que la sécurité de ma famille sera assurée, et la vermine éliminée.

Je m'approche d'elle pour lui faire face à quelques centimètres tandis qu'elle est assise sur le fauteuil.

Assigne dès cette nuit une poignée d'hommes à leur sécurité rapprochée en plus de l'équipe du NYPD. Les hommes devront rester discrets et efficaces. La moindre présence étrangère en dehors des hommes du NYPD devra être éliminée.

Dans quelques heures  nous mettrons ensemble un plan en place concernant l'enlèvement de Scott et l'élimination de ses gorilles. Plan qui devra être mis à exécution en plein jour pour créer une panique totale, imprévisible et incontrôlable.

J'ai déjà l'essentiel du plan en tête et elle le sait. Il est temps de passer à l'action. J'ai un regard pour la cafetière dans la pièce d'à côté, si je m'écoutais je mettrais mes plans en place dès maintenant. Mais nous allons avoir besoin d'un minimum de sommeil.

J'aurais également besoin de tes lumières d'un point de vue financier pour détourner intelligemment la clientèle des casinos.

J'acquiesce d'un simple hochement de tête et profite de son absence pour aller enfiler un pantalon et un t-shirt. Ce n'est pas qu'être en serviette me gêne, mais je préfère être vêtu pour faire travailler mes neuronnes.

Sur une feuille de papier j'ai esquissé un croquis rapide de New York et des emplacements des casinos emblématiques des Sadovski. J'attends le retour de mon bras droit, les neuronnes en ébullition. Je comptais l'épargner cette nuit, mais puisqu'elle c'est elle qui me lance, alors qu'il en soit ainsi.

Je tourne la tête vers elle à son arrivée avec le fameux regard que j'ai toujours eu lorsque j'expliquais les modes d'emploi des serials killers.

Bien. Le plan sera simple et à triple entrées et à mettre en œuvre la nuit prochaine.

Quatre équipes seront coordonnées tout au long des opérations. Angel se chargera du coup d'envoi avec ses hommes en se chargeant de Scott et ses gorilles, le tout en subtilité.

Le second groupe intervient dans la foulée en récupérant les corps des agents du FBI exécutés pour les trainer sur les toits des casinos. Dans le même temps ils laisseront un cadeau de ma part à la famille Sadovski, soit quatre cobras cracheurs rouge par casino. Ils se faufileront par la cheminée et les conduits d’aération aisément.

Je lui désigne les cinq casinos en question sur le croquis, il s'agit bien de ceux qui forment l’Étoile du Nord.

Les casinos sont bien actifs la nuit, des corps sur des toits ne passent pas inaperçus longtemps, et des serpents encore moins. Les Sadovski qui sont très à cheval sur la légalité comme nous le savons tous, vont avoir rapidement affaire aux services sanitaires ainsi qu'au NYPD qui fera fermer les cinq casinos fétiches de la famille.

La troisième équipe qui se charge de suivre les héritiers d'Isaak Sadovski, entrera en action simultanément avec la seconde. Les règles sont les mêmes que pour Scott, je les veux en vie, yeux bandés à m’attendre au frais dans la planque la plus sombre que nous avons. Le surplus devra être éliminé et abandonné dans les ruelles de la ville, à moins qu'une pièce maitresse n'entre en jeu.

J'attends une poignée de secondes sans ajouter quoique ce soit, je fixe son regard qui pourrait me dire "et le quatrième groupe il fait quoi ?" Et j'y réponds le plus simplement du monde.

Le quatrième groupe sera plus conséquent en nombre d'hommes, ils seront en support des trois autres groupes notamment pour leur éviter de se faire dessouder, en utilisant des armes lourdes en cas de nécessité et leur offrir une porte de sortie. Si je préfère que cette mission de grande envergure reste une mission d'assassinat et d'enlèvement pure et dure, mon expérience du terrain aussi minime soit-elle, m'a toujours prouvé qu'un simple déraillement peut faire plomber tout le système, aussi bien huilé soit-il à l'origine.  Les hommes devront être prêts à riposter à tout moment.

Efficacité, célérité, intelligence. Je veux les récupérer tous en vie.

Cette fois je me tais et je l'interroge du regard, quelles sont les failles du plan, et comment compte-t-elle les colmater ?

Mon regard ne quitte pas le sien :

Tu as raison, cette étape mettra les hommes à découvert inutilement et nous essuierons nécessairement des pertes. De plus, mes méthodes ne sont pas celles que Charlie a utilisé pour riposter suite à l'assassinat du Ministre de la Défense. Gardons l'avantage de l'invisibilité dont nous bénéficions pour le moment.

Éliminons le superflu du plan pour ne conserver que l'essentiel à savoir les enlèvements simultanés de Scott et des héritiers Sadovski que nos hommes suivent nuit et jour depuis plusieurs mois.

Je garde la structure des quatre équipes, deux chargées des enlèvements, et deux autres en support de chacune d'entre-elles. Les corps des victimes recevront tous la morsure du serpent avant d'être abandonnés dans les rues de New York.

Je me cale dans le fauteuil en croisant mes doigts :

Cela te semble-t-il être un plan d'action correspondant mieux au gang et aux habitudes des hommes ? As-tu des touches personnelles à ajouter ou souhaite-tu peaufiner voire modifier une partie du plan ?

J'écoute avec une très grande attention ses remarques et préconisation de morcellement du plan. Je réorganise mes réflexions en fonction de ses propositions. Je plisse les yeux en me frottant le menton, je suis obligé de faire un gros travail intellectuel, mes idées ne venant pas naturellement.

C'est bien plus facile de dénouer des enquêtes de A à Z en se mettant dans la tête des serials killers, que de monter soi-même un plan d'attaque. Ce n'est pas encore naturel, mais ça viendra. Continue à pointer mes failles, je vais avoir besoin de tes talents stratégiques.

Je passe ma main sur ma barbichette naissante :

Je me fie entièrement à ton expérience en suivant tes propositions. En ce qui concerne l'enlèvement de Scott et de l'exécution de ses hommes, il n'est pas utile de nous révéler au grand jour, je réserve ce moment pour la seconde phase. Cette étape doit me permettre de mettre tous les savoirs-faire des assassins en avant.

Je sais que Scott est en permanence affublée de cinq agents qui lui servent quasiment d'esclaves. L'idée, c'est qu'en les éliminant, personne ne soit capable de se dire au premier coup d’œil sur quel territoire ils ont été tués de sorte que cela puisse être l’œuvre de n'importe quel gang.

Je sens que ça commence à venir bien que ma stratégie ne soit pas parfaite

Les NW, comme les One Niners ont autant de raisons d'éliminer le FBI qui est responsable certes de ma déchéance mais aussi de l'évolution des Sadovski depuis l'assassinat du Ministre de la Défense. Les Niners sont les premiers à avoir riposté, et l'attaque de la Villa suivie de la mise sous scellée du cabinet de Mary Wolf par Scott, contribue à l'effervescence au NYPD. Elle est soupçonnée par le NYPD de blanchir de l'argent pour faire tourner son cabinet.

Je me penche pour nous servir un verre d'eau sans quitter son regard pour autant et je poursuis le fil de ma réflexion avant qu'elle ne me quitte :

C'est d'autant d'éléments, sans compter le pacte passé entre les Yakuza et le FBI, pour nous permettre de brouiller les pistes tout en portant le premier coup intéressant depuis la mort de Vladimir.

Scott traque les gangs locaux depuis des années, à force de se pavaner avec ses toutous avec son statut d'intouchable sur les territoires des gangs, elle aura fini par tomber dans un guet-apens qui leur aura coûté cher.

Les NW et One Niners savent qu'ils ont la suprématie et détestent que l'ont marche sur leur plate-bandes. Dès lors il me semble qu'il ne devrait pas trop difficile de faire monter la tension d'un cran en éparpillant les corps  sur chaque territoire qu'ils se partagent depuis plus de cinq ans. Y compris sur Staten Island qui appartient aux One Niners, pour le NYPD. Il suffira alors que le corps soit paumé entre deux hangars par exemple.

Je bois une lampée avant de l'interroger :

Vois-tu où je veux en venir ? Nous rabattons les cartes, et en plaçant au moins un corps sur notre territoire, nous n'attirons pas l'attention sur nous dès lors que les corps seront sur chacun des territoires. En sommes, le FBI serait une diversion tout en éliminant une teigne qui cogne sur tous les gangs sans savoir où elle met véritablement les pieds.

Je fronce les sourcils à ma propre réflexion avant de dire finalement ce qu'elle pensera certainement elle-même, en me remémorant ce qu'elle disait il y a quelques mois, "un meurtre reste un meurtre".

Garde l'axe de la confusion que je compte créer en éliminant les agents les plus proches de Scott, sans que son propre corps fasse partie des victimes. En éliminant en toute discrétion ses hommes dans les rues de Manhattan, le trouble sera tout autant causé, et cela facilitera la tâche des assassins pour agir. Inutile de les mutiler par ailleurs, bien au contraire, toute l'énigme résidera dans la question de savoir où est passée Scott, et qui est responsable ce quintuple meurtre gratuit.

J'incline la tête aux nouvelles de mon bras droit avant de me lever sans me presser. J'adresse un clin d’œil à Angel en passant près de lui, l'air de dire "je t'avais prévenu".

Je vais récupérer un pack de 12 bouteilles d'eau dans la réserve sous le regard amusé de mes hommes. Je lance avec un sourire :

Il faut bien ça pour un tête-à-tête avec mon agent du FBI préférée. Promis je vais savourer, je ne l'esquinte pas trop vite.

Je lance un chiffon sur mon épaule avant d'aller rejoindre ma captive en Enfer. Je ne lui réponds pas immédiatement lorsqu'elle me reconnait et me crache mon nom, comme un fruit pourri à la figure.

Je m'approche à à peine un mètre d'elle et dépose le pack d'eau à côté de moi. Debout face à elle je baisse la tête pour lire la rage dans ses yeux :

A qui t'attendais-tu Scott ? Au père Noël peut-être ? Je me suis laissé entendre que tu me cherchais depuis 7 mois, alors plutôt que de venir à toi, je me suis permis de te mener à moi.

Je lui caresse les mâchoires de l'indexe :

Pourquoi tant de haine ? C'est mes hommes qui t'ont mise dans cet état ?

Je lui attrape le menton fermement avec plus de poigne qu'elle ne m'a connu jusque là :

Pourtant ils n'ont fait qu'exécuter mes ordres à la perfection, ils n'ont pas touché à ton joli minois, quand bien même tu en as défiguré un.

Je retire ma main pour prendre une bouteille d'eau pour en boire une gorgée et de lui mettre le goulot au bord des lèvres, avant d'imbiber le chiffon, pour lui tamponner le visage.

J'espère que tu apprécieras tout l'amour que j'ai mis dans cette pièce, rien que pour toi. J'ai passé des journées entières seul ici, pendant que tu squattais tranquillement le NYPD.

Je m'accroupis à sa hauteur avant de planter mon regard dans le sien :

Non Scott, tu ne feras plus rien de tout ça. Tu as joué de très belles cartes je l'admets. Le petit coup de main des Sadovski pour me faire tomber la deuxième fois de la tête du NYPD, il était bienvenu hein ? Chaque chose en son temps, eux aussi je leur réserve quelques surprises.

Je retire ma chemise que je pose sur le dossier de la chaise sur laquelle je m'assois :

Le FBI ne m'intéresse pas, tu es le seul agent qui a le privilège de me revoir. Je crois que tu ne comprends pas ce qui se joue au-dessus de nos têtes en ce moment. Et tu n'as pas tout à fait raison.  D'ailleurs de la part de celle qui a vendu le FBI aux Yakuza, c'est un peu bas.

J'ai longuement traqué les gangs corps et âme, mais quand tu réfléchis un peu et que tu mets de côté la naïveté, si tu n'as pas de proposition solide à faire pour maintenir tout le système américain en équilibre, tu ne peux pas éliminer la pègre qui contrôle tout, jusqu'aux finances et à la politique du pays.

Alors tu prends place sur l'échiquier grandeur nature qui existait bien avant toi et tu gagnes ton pain comme tu peux, comme tu l'as fait avec le Dragon Noir, ou alors tu tiens les ficelles, comme moi. Chacun a son rôle à jouer Scott, y compris toi. Tu t'acharnes sur moi depuis des années, mais je ne suis pas certain que tu saches où va New York.

Je bois de longues gorgées d'eau avant de lui en proposer.

Durant mes cinq années à la tête du NYPD, j'ai permis d'épargner de  nombreuses vies en maintenant la paix. Et tu ne pourras pas le nier malgré tout ce que tu pourras me mettre sur le dos. J'ai limité les fusillades pour réduire le nombre de balles perdues. J'ai réduit les trafics pour que la population n'y soit pas mêlée. Combien d'assassinats peux-tu décompter durant ces cinq années Scott ?

Bien sûr ça peut paraître louche que toute sorte de criminalité disparaisse de New York dès lors que j'ai pris la tête du NYPD. J'ai protégé la population comme je l'ai toujours promis, en ce sens je n'ai pas menti, la sécurité était revenue.

Je m'enfonce dans la chaise :

Tu sais Scott, il y a plusieurs sortes de marionnettistes, tu as ceux qui te bercent d'illusions pour mieux te planter derrière, et tu as ceux qui comme moi, n'agissent que dans un but unique, au seul profit de la population.

Il ne faut pas se voiler la face, tu as constaté autant que moi que la vie new yorkaise n'a jamais été autant en effervescence que durant ces cinq dernières années.

Je lui repasse le torchon sur le visage avant de continuer, sachant qu'elle ne peut rien faire d'autre que de m'écouter. Comme elle le dit, je suis un manipulateur et elle n'est pas plus résistante que n'importe qu'elle autre personne.

Connais-tu la vague de conséquences que tu as déclenché en m'envoyant dans l'ombre Scott ? Mis à part faire exploser la bulle sécuritaire de la population new yorkaise, et de piétiner ma réputation pour ton bon plaisir, tu as enclenché une apocalypse, et je pèse mes mots.

Tu crois peut-être que je jouissais tranquillement de ma position, mais tu te plantes sur toute la ligne. Je vais faire de toi la témoin directe du bain de sang que va connaître New York. Aucune police, que ce soit le FBI ou le NYPD ne sera capable de contenir les massacres.

Mon regard se durcit et mon charisme gonfle :

Je te le répète depuis de trop longues années, tu te trompes de cible depuis toujours. A moins que la marée de cadavres de civils qui n'ont rien demandé, dans les rues de New York ne soit ce que tu as toujours cherché ?

Son visage reflète différentes émotions : dégoût, fierté, négation, doute... Elle refuse tous tes gestes de secours.
 
JE N AI PAS VENDU LE FBI PUTAIN !!

JE NE SUIS PAS LA CHEF DU FBI BORDEL DE MERDE ! VA FALLOIR QUE JE TE LE DISE EN COMBIEN DE LANGUES ?!

J'étais avec toi imbécile quand les Yakuza et Peter nous sont tombés dessus ! Ce que j'ai fait ensuite c'était pour sauver ma vie, enlever le fils du chef des Niners c'était pour le tenir et détruire son gang, pas pour les Yakuza qui étaient de toute façon morts face aux autres gangs qui avaient formé une alliance.

Son visage goutte de sueur devant ce flot de paroles.

Et je ne comprends pas quand tu dis que le FBI est de nouveau tomber entre les mains d'un gang. Les Sadovski sont louches oui, je te l'accorde, mais ils n'ont pas de comportements qui font penser à un gang comme la revendication d'un territoire. Tout est légal et clean chez eux ! Que crois-tu ! J'ai tout vérifié !

Pour ce qui est donc du témoin qui m'aurait aidé à obtenir des informations pour te faire tomber, je ne le connais pas, les seules images que j'ai pu tirer de ce type c'est un mec encapuchonné qui a déposé dans le courrier une enveloppe avec des informations et des relevés du cabinet Wolf que tu as utilisé pour gagner ton procès contre le FBI à l'époque.

Tu t'es empoché beaucoup trop d'argent grâce à cette avocate de malheur qui avait les juges dans sa poche. Comment, ça on en sait rien, sans doute un pot de vin. Je sais très bien qu'elle et son mari sont les chefs de gang des Northem Wolves !! Et j'allais les faire tomber avant que tu ne me captures pauvre abruti ! Tu as tout fait foirer, ça aurait fait un gang de moins.

Tu te trompes sur mes intentions Summer, je ne fais que mon travail. Le chef des Niners est insalissable pour l'instant mais pas ceux des Loups. Ils croyaient peut être qu'une explosion aussi violente dans une villa allait passer inaperçu ? Ainsi que l'enterrement bien que privé du propriétaire ? Non, non. Comme par hasard, il n'y avait que des NW à l'enterrement.

Je secoue la tête lentement en fermant les yeux quelques secondes :

Tu n'avais aucune chance d'arriver à tes fins. Si je ne t'avais pas capturé, les Northem Wolves t'auraient tué sans le moindre scrupule. Tu ignores encore trop de choses pour pouvoir mettre la main sur le moindre leader qu'il soit. Je ne dis pas que tu es bête, loin de là, tu fais de bonnes déductions, mais tu n'as pas les moyens d'agir.

Je consens à lui révéler une partie de ce qui se passe depuis quelques mois :

La guerre des gangs est déclarée. Si tu veux faire tomber un gang, voire plusieurs, comme le sont mes intentions depuis le début, la meilleure chose à faire c'est de les laisser s'entretuer et de les achever. Pour le moment ils sont bien trop puissants pour agir, ils ne détiennent pas que New York, c'est toute l'Amérique qu'ils ont entre leurs mains.

Je lâche un soupir avant de boire. J’approche mon visage du sien en ayant une main appuyée sur ma cuisse droite :

Je me suis peut-être trompé sur tes réelles intentions Scott, mais que crois-tu que je suis ? Un simple flic ripoux qui manipule la population et tous les honnêtes gens qui l'entoure depuis 5 ans ? Ce ne sont pas mes intentions, loin de là même.

Crois-tu que je porte les gangs dans mon coeur ? Que j'ai oublié que par leur faute je n'ai plus de père aujourd'hui ? Si je me suis laissé approcher, ce n'était pas pour devenir un Staer bis. Bien au contraire, lui c'était un simple pantin, un pion trop faible pour imposer son indépendance comme je l'ai fait. J'ai toujours refusé d'être instrumentalisé par les gangs, et ce n'est pas demain la veille que ça arrivera.

Je trafique avec eux, je les étudies, j'attire leur confiance. J'obtiens toutes les informations les plus cruciales que je veux par leur biais, en somme je leur montre patte blanche. Mais je ne fais qu'une chose à travers tout ça, je les endors.

Je lui passe l'indexe sous le menton pour lui relever la tête :

Je ne suis pas en train de te manipuler Scott, je te livre mes réelles intentions. Je n'ai pas changé d'objectif, il est toujours le même depuis que je suis arrivé au NYPD il y a 8 ans. Seulement il n'y a pas que New York en jeu, les gangs locaux sont enracinés depuis bien trop longtemps pour espérer les éliminer en faisant tomber leurs leaders. La relève est assurée depuis longtemps déjà.

Je me passe la langue sur les lèvres :

Crois-moi ou non, mais en te mettant sur le devant de la scène comme tu t'apprêtais à le faire, tu vas droit vers ta dernière demeure. Et même si tu me traques depuis des années et que ça commençait sérieusement à me gonfler, je pourrais te souhaiter tout le malheur du monde, Scott, mais pas ça. Et contrairement à ce que tu disais, je n'ai pas l'intention de te tuer.

Je lève la tête vers le plafond :

J'emploie peut-être des méthodes brutales, mais tu es certainement dans le lieu le plus sûr de New York aujourd'hui. Si tu n'es pas la cible privilégiée des gangs locaux pour le moment, tu ne restes pas moins un pion extrêmement gênant.

Je sors mon portable qui déraille, et lui désigne ma montre qui en fait autant.  Je fais une ultime tentative à lui proposer de l'eau avant de lui poser une question :

Que sais-tu à propos de la Famille Sadovski mis à part le fait qu'ils soient clean sous tout rapport à première vue ?

S'il y a une chose que je déteste, c'est bien que l'on se paye ouvertement ma tête, et encore moins lorsqu'on met ma famille au milieu de tout ça. Je sais suffisamment que je risque de les perdre sans avoir besoin que cette connasse me le répète.

Le visage impassible, j'incline la tête en me levant de la chaise, je lui tourner le dos avant de faire volte-face lui envoyant un revers de main avec toute la violence que je retiens depuis ces années, en plein visage.

Je raccourcis les chaînes de ses bras de trois crans d'un geste avant de lui tirer la tête en arrière en l'attrapant par les cheveux, rendant le lien de soumission autour de son cou à la limite du supportable.

Je te ferai ravaler ta fierté avant que tu n'écrases la mienne de ton talon Scott. Je n'ai jamais hésité à flirter avec la mort à plusieurs reprises pour les new yorkais.

Les cinq cicatrices sur ma poitrine luisent sous l'effet de la chaleur sous ses yeux.

Tu n'as pas touché la froideur de la mort ne serait-ce que d'un doigt depuis ces cinq dernières années. Tu fais la belle en targuant que tu ne la crains pas et que tu l'acceptes telle qu'elle viendra, parce que tu es face à moi, et que tu refuseras de faire remonter tes peurs les plus profondes.

Tu peux refuser toute main tendue de ma part ne serait-ce que pour les besoins vitaux de ton corps, mais il sera trop tard pour me supplier de te sauver la vie lorsque tu seras aux portes de la mort cette nuit. Réfléchis à ce que seraient les prochaines heures sans avoir de quoi t'hydrater en mon absence, à te retrouver par ton propre fait dans un état critique à voir défiler ta vie devant toi, impuissante, alors que j'ai les moyens nécessaires pour que tu vives.

Mon regard bleu translucide transperce le sien pour aller chercher au-delà de ses barrières mentales, ses peurs les plus enfouies. Si elle bloque ses craintes face à la mort devant moi, son corps va la trahir, sachant qu'il souffre déjà du manque d'eau qu'elle se refuse d'accepter par simple fierté.

Je relâche sèchement sa tête et lui tourne le dos en emportant ma chemise et le pack d'eau. Je me dirige vers le fond de la salle avant de lui dire sans me retourner :

Réfléchis bien à ce que tu veux réellement Scott, tu as toujours une place sur l'échiquier.

Un sourire se dessine sur mes lèvres à sa dernière phrase. Peut-être a-t-elle raison, et sans doute qu'au fond de moi je suis le plus dangereux car imprévisible. Je suis une véritable bombe à retardement.

Je pivote sur mes talons avant de sortir le couteau de son étui attaché à ma ceinture. Je me rapproche en faisant jouer le couteau entre mes mains :

Peut-être as-tu raison. Sans doute est-ce écrit dans mes veines que je devais chuter devant toute l'Amérique pour réapparaitre dans l'ombre.

Je caresse son visage avec le plat de la lame plus fraiche que la température ambiante de la pièce.

Depuis que je suis entré au NYPD, je sais que je suis condamné à ne pas mourir d'une mort naturelle.

Ma lame se redresse lentement sur sa joue et glisse pour entamer la première branche de l’Étoile du Nord.

D'une main ferme je lui maintiens le cou et continue mon tracé tout en lui parlant :

Je ne suis pas encore pourri jusqu’à la moelle Scott, oui je n'emprunte plus la voie de la légalité pour parvenir à mes fins qui sont sensiblement les mêmes que les tiennes, mais les seuls pouvoirs légaux ne suffiront pas pour éliminer la gangrène de l'Amérique.

Je termine mon geste en essuyant ma lame sur ses vêtements déjà en lambeaux :

Si tu es aussi clean que tu le dis, alors dans ce cas c'est tout à ton honneur. Pour ma part j'aurais tout le temps de regretter mes choix lorsque cette putain de guerre sera terminée.

Je vais entamer une seconde bouteille d'eau puisque la première a été éclatée. Contre sa volonté, je la force à ouvrir les mâchoires d'une pression et de lui verser de l'eau dans la bouche, bien que je m'attende à ce qu'elle en recrache la moitié sur moi.

Je m'essuie le visage d'une main avant de rengainer mon couteau pour éviter de prendre le risque de lui donner un coup fatal. Je fixe son sang qui coule dans son cou avant de lui répondre :

Ce n'est pas mon rôle de te tuer. Je mets juste fin à une partie d'échec qui a duré cinq longues années. Et il faut l'avouer, je rends un grand service à énormément de monde en te maintenant ici. Au fond je n'attends rien de toi.

Je hausse les épaules tout en ayant le goulot de la bouteille sur les lèvres :

C'est con, je t'aimais bien, au début. Avant que tu ne me colles un peu trop aux baskets à mon goût. On se cherchait et se chamaillait plus qu'autre chose, c'était assez amusant. Puis tu es devenue un peu trop omniprésente, notamment au NYPD, tu es devenue insupportable en prenant tout le monde pour des moins que rien.

Et puis tu as cherché à me couler, d'accord tu avais un peu raison, j'ai toujours caché beaucoup de choses. Avec ton dernier coup, tu m'as envoyé ici. Au-delà du rôle que je jouais à New York, je suis certain que tu avais des raisons personnelles pour t'attaquer à moi plutôt qu'aux gangs en priorité. Avant même l'affaire judiciaire, tu attendais quelque chose de moi que je ne t'ai pas donné, ou pas assez.

Tu voulais faire tomber Staer à ma place c'est ça ? Je me souviens encore lorsque tu m'attendais dans son bureau après que je l'aie envoyé en cellule. Ou tu voulais achever Salvatore ?

Je fais une petite moue :

J'aurais peut-être du partager quelques lauriers avec toi. C'est pour cette raison que tu as pris tant de plaisir à détruire tout ce que j'ai construit comme tu as dit, n'est-ce pas ? Un peu de jalousie. Il suffisait de me le dire tu sais.

Je passe l'indexe sur son cou avant de lécher son sang. Mon regard glisse sur sa silhouette. Les souvenirs du passé refont surface.