Episode 5 : Tentations [Abigail]

Tu attends patiemment ton chef depuis une vingtaine de minutes, il devrait arriver bientôt...

As-tu réfléchi à ce que tu voulais lui dire ? La mission, ce que tu as appris en Californie, les Northem Wolves, tes sentiments, Bastian ? Ca tourne dans ta tête, non?

La mission s'est bien déroulée selon le plan que nous avions mis en application. Les Sadovski étaient tous morts comme convenu, j'ai même pensé à ramener trois têtes pour le prouver, bien que cela me donnait une certaine nausée rien qu'à y penser. Bref.
Tout s'était bien passé, et j'avais même réussi à créer une certaine complicité avec notre ami Nomade et ses acolytes. Peut-être que cela veut dire qu'une alliance est encore possible ? Travailler ensemble fut chose aisée et agréable. Cette histoire de pacte peut exister. Au moins ai-je gagné un nouveau contact.

C'est donc l'esprit remplit de fierté d'avoir accompli ma mission comme il se devait, mais néanmoins encombré que je suis rentrée sur New York avec mes hommes, nos nouvelles armes et les munitions allant avec.
Je crois que ça m'angoisse un peu de revenir.

Les dernières semaines ont été quelque peu éprouvantes... L'attirance grandissante pour Jaden et la ligne infranchissable que j'ai accepté de franchir pour aller dans ses bras... L'annonce sur Bastian qui serait encore en vie... La remontrance de Jaden sur mon rôle de Lieutenant... Ce dernier mis à rude épreuve une nuit, et assumé pleinement ensuite.
Le fait que Jaden ait dû partir précipitamment vers New York sans autre explication que le fait que Charlie avait besoin de son aide. L'absence de mes enfants depuis trop longtemps et l'insécurité à ce sujet, une certaine peur en fait depuis que je sais Bastian en vie quelque part.

C'est donc l'esprit lourd que j'ai franchi la porte de la vieille villa, notre bon vieux QG avant de me diriger vers le bureau de Charlie où je patiente depuis plusieurs minutes maintenant.
Mais de quoi lui parler ? Ai-je enfin le droit à des explications concernant Bastian ? Dois-je la jouer au contraire plutôt neutre en abordant d'abord la question de la mission Nomade qui fut, on peut le dire, une sorte de succès ? Dois-je demander où sont mes enfants et s'ils sont en sécurité ?

Je ne sais pas. Il y a tellement de choses à dire et à aborder. Mais que me laissera faire Charlie ?
Cela fait des semaines que je ne l'ai pas vu, je dirai même un ou deux mois. Il semblait bien occupé ces derniers temps. Comment cela va-t-il se passer ?
J'ai toujours eu des difficultés lors de nos entrevues. Toujours du mal à me sentir totalement à l'aise en sa présence. Et la dernière fois qu'on a eu une véritable conversation personnelle, il m'avait pris au dépourvu en me devançant pour les enfants. Le reste ne fut plus que travail encore et encore.
Donc je ne sais pas sur quel pied danser, mais il possède sûrement des réponses à certaines de mes questions.

Je me lève, je m'étais assise en entrant, mais ces minutes de silence qui s'égrainent sans voir venir Charlie commencent à me mettre les nerfs en pelote. Je vais vers la fenêtre afin de regarder ce qui s'y passe, puis je reviens sur mes pas, je regarde les livres dans une bibliothèque dans un coin sans vraiment voir les titres, je reviens sur mes pas, bref, je tourne en rond. Je déteste cette attente interminable.

Je crois qu'il va falloir que j'aborde la mission, qui permettra d'aborder l'information qu'on nous a fourni sur mon mari. Et ainsi de suite.
Ou alors... je parle des enfants ? Je ne sais plus. Et Jaden qui n'est pas là. Putain. Je déteste ça !

La porte finit enfin par s'ouvrir sur Charlie. Celui-ci a meilleur mine que quand tu étais parti. Toujours parfait dans ses costumes italiens, il remet son bouton de manche avant d'aller s'asseoir dans son fauteuil en cuir, derrière son immense bureau.

Il finit par relever le visage vers toi, t'offrant ainsi deux yeux bleus en guise de vis à vis.

Il fait un geste de la main, t'invitant à parler.

Charlie met enfin un terme à ma torture mentale en entrant dans la pièce.
Et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il semble mieux que la dernière fois où je l'ai vu. Il a l'air en forme.

Tant mieux. Je me posais des questions de ce côté-là aussi quand Jaden a dû revenir précipitamment sur New-York. Savoir que notre boss va bien me soulage un peu, au moins notre repère à tous est-il encore stable et en place.
Je m'approche un peu du bureau lorsqu'il m'invite à parler et je me rassoies dans un des sièges afin de le voir en face sans baisser les yeux, ou sans que lui n'est besoin de lever les siens.

La mission des Nomades a bien fonctionné. Plusieurs lieux et hangars où les traitres se trouvaient ont été brûlés. Il n'en reste aucun corps. Quelques têtes sont prêtes à être envoyées pour montrer notre présence et notre force si besoin.

Je me tais. J'ai toujours été mal à l'aise en présence de Charlie.
Je reprends donc d'une voix égale.

On a réussi à détourner une cargaison d'armes et à détruire l'une de leur fabrique de munitions et l'un de leur hangar de stockage. J'ai récupéré la moitié de ces derniers. Des nomades NW se sont joints à nous, des NW qui haïssaient les Sadovski pour vouloir leur mort.

Je m'arrête là pour l'instant sur ce sujet. Je capte ensuite le regard de Charlie que j'avais légèrement éviter en regardant distraitement derrière lui. Cette fois je le fixe.

Mais avant ça, on a reçu une information lors d'un guet-apens... sur Bastian. Il serait encore en vie et ils chercheraient à mettre la main sur moi. Charlie. Où sont mes enfants et Lola ?

Voilà.
J'ai aussi abordé la question de ma famille.
Je me replonge dans le silence. J'attends. J'ai l'impression d'avoir le cœur qui bat à cent à l'heure en attendant sa réponse, non, ses réponses, ses éclaircissements mêmes.

Il te fixe avec un regard différent de d'habitude.

Tu as changé. C'est bien. Ce sera plus favorable pour le gang, Jaden a été un bon mentor à ce que je vois.

Pour ce qui est de tes enfants et de Lola, ils sont en Sicile, avec Ellen et mes enfants. Dans notre résidence secondaire. Tu n'as pas à t'en faire pour eux, ils vont bien et s'amusent beaucoup.

Comme preuve à l'appui, il pousse une tablette tactile vers toi où des photos de tes petits monstres défilent dans différents endroits de l'île italienne.

Ils ont un grand sourire sur chaque, Théo et Josh semblent bien s'entendre au vu des photos où ils sont ensembles et font suer Ellen et Lola.

Pour ce qui est de Bastian... C'est encore flou, Abigail. Peut-être est-il encore en vie, mais... Il ne sera pas celui que tu as rencontré. Ils l'ont torturé. Je vais organiser un échange pour lui.

Je suis un peu déstabilisée par l'attitude de Charlie. Il semble... comment dire ? Accessible par rapport à d'habitude.
Il me prend encore une fois au dépourvu bien que je fasse en sorte de ne rien montrer. Son allusion à Jaden n'y est pas pour rien. Je me doutais bien que plus que l'aide proposée spontanément par son second bras droit, il serait forcément derrière. Jaden s'est occupé de cette mission avec moi presque du début à la fin après tout.

Mais je reporte mon entière attention sur lui quand il aborde enfin le sujet de mes enfants. Et j'ai le cœur qui se serre lorsqu'il me tend une tablette tactile sur laquelle je vois défiler des photos de mes bouts de chou. Mes bébés.
Je ne peux m'empêcher de sourire tendrement en les voyant, touchant du bout du doigt ma petite Amara sur l'écran, ou à rire intérieurement à voir mon petit Joshua aussi fier aux côtés du fils de Charlie et Ellen.

Cela me rassure de les savoir si loin bien que cela me soit difficile. Leur présence me manque. Ne plus les voir jour après jour est parfois dur, mais j'ai fait un choix, et je dois l'assumer, encore plus maintenant où une guerre ouverte est présente sur New-York entre les gangs.

Je repose la tablette alors que Charlie reprend la parole, à propos de Bastian cette fois.
J'accuse le coup lorsqu'il dit qu'il ne sera plus pareil.

Je sais. Je ne m'attends pas à le revoir en un seul morceau. Mais c'est mon mari. J'ai besoin de le voir et de le savoir en vie.

Je le fixe sans sourciller. Je m'y suis fait depuis l'annonce faite par ce Nomade dans ce bar en plein désert. Je me suis fait petit à petit à l'idée de ne pas le revoir indemne.
Donc je ne cillerai pas, je resterai forte.

Tu parles d'un échange ? Qui ?

Je me demande qui il propose. Un Sadovski ? Un membre bien placé de la fameuse famille russe ?

La porte s'ouvre sur Jaden en béquilles,

D'aleksandr Sadovski, héritier légitime d'Isaak Sadovski.

Charlie ne sourcille pas devant son bras droit légèrement amoché.

Son demi frère m'a échappé. Saloperie de vipère. Il est mauvais.

Ce n'est pas faute de t'avoir prévenu Jaden, dit Charlie. Le grand brun est peut être un abruti fini, mais l'autre est bien plus intelligent et tacticien au vu de son comportement sur le terrain. Il a tout de même attrapé Bastian, au détriment de la vie de sa petite amie. Ça veut dire qu'il est prêt à tout pour obtenir le pouvoir.

J'encaisse coup après coup chaque information lancée dans cette pièce depuis maintenant deux minutes que dure l'échange entre Charlie Nine et son second bras droit Jaden.

L'héritier légitime des Sadovski ?
Un demi-frère ? Une petite amie morte ? Une putain de fille est morte pour pouvoir capturer mon mari ?
Un tacticien souhaitant obtenir le pouvoir ? Attendez. J'ai loupé un gros épisode là. Depuis quand en savent-ils autant sur le sujet ? Surtout Jaden qui était presque tout le temps avec moi ces derniers mois ?

J'ai mon poing droit qui se sert sur ma cuisse de colère retenue. Je viens d'en apprendre plus en à peine deux minutes qu'en six mois de cavales !
Et ce que j'entends me fout en rogne. Et de voir Jaden en béquilles n'arrange rien non plus, ainsi que l'attitude nonchalante, surprenante d'ailleurs, de mon boss.

Depuis... Depuis quand surveillez-vous d'aussi près ces héritiers Sadovski ?

Je contiens à grand peine ma colère, la seule chose qui permet de la montrer est ma voix qui est devenue glaciale, et mon regard qui s'est enflammé à l'évocation de cet enfoiré de Sadovski présent je ne sais où sur notre territoire.
J'ai appris à me maîtriser, encore plus ces derniers mois, mais toutes ces informations ne me laissent pas insensibles, loin de là même. Je suis en train de bouillir intérieurement.

Qui nous dit qu'Isaak acceptera sans broncher notre échange ? Il a torturé Bastian. On torturera son fils. Si c'est un abruti, il ne résistera pas longtemps face à la torture et nous parlera.

Je suis énervée. Depuis une demie-heure, je passe par toutes les émotions et ça commence sérieusement à m'agacer, là, maintenant.
Je me lève. Je ne supporte plus de rester en place et je me dirige vers la fenêtre. Reprendre mon calme, c'est le plus important.

Et le demi-frère, qui est-il ? Y a-t-il d'autres personnes autour d'eux susceptibles d'être importantes ? J'aimerai comprendre ce qui se passe réellement. Et savoir ce que moi je peux faire concrètement.

Je fixe Charlie.

Qu'attends-tu ?

Je le questionne bien comme quelqu'un de son gang qui a besoin d'informations pour réaliser quoi que ce soit et agir en conséquence. Je ne veux plus rester sur la touche à propos de cette histoire qui me touche particulièrement.

Charlie fait signe à Jaden de t'expliquer ce que tu as manqué. Après tout, il est le boss, depuis quand c'est à lui de faire des rapports ? Ton amant d'une nuit te répond, tranquille :

On a commencé à les surveiller un peu avant que Bastian n'entre en action. C'est pour ça que la petite amie du demi frère est morte. Bastian pensait avoir cerné le mec et comptait sur ça pour avoir une porte de sortie après son coup.

Pour ce qui est du demi frère, c'est Vasili Sadovski, c'est le bâtard d'Isaak. Mais il est plus intelligent que son aîné, un peu du même genre que sa sœur. Kira Sadovski.

Normalement je devais les attraper tous les deux. Mais le plus jeune m'a échappé. Il se défend foutrement bien ce connard.

Pour ce qui est de l'échange, reprend Charlie. Rien n'est sûr. Isaak peut sacrifier son fils, après tout il est arrogant. Mais pour le moment c'est tout ce que j'ai pour récupérer mon ancien bras droit et ton mari...

Tu as carte blanche avec Jaden pour le Sadovski que nous avons capturé et pour l'organisation de l'échange. Je superviserai en partie l'opération, mais vous serez sur le terrain.

J'écoute parler Jaden en silence. Cela se réfère donc à avant la décision de Bastian, pendant les semaines où il a joué le fantôme, me laissant entièrement seule avec les enfants.
Et donc juste avant que je n'obtienne l'information sur les traîtres Nomades et leur présence au sein de notre territoire. Avant que le fameux jour fatidique où Bastian ne parle d'une mission suicide ne se passe.

J'encaisse en silence. Cela remonte à six mois, six longs mois, et voilà mon mari depuis presque aussi longtemps dans le camp adverse, entre des mains sales et cruelles. Et Jaden était au courant. Je ne peux m'empêcher de lui lancer un regard noir rempli de colère alors que je digère ses informations.
Il y a donc une sœur également. Trois enfants Sadovski dont l'héritier entre nos mains.

Par contre, je suis légèrement surprise par les paroles de Charlie lorsqu'il annonce qu'il n'a que ça pour pouvoir libérer Bastian. Quelqu'un aurait finalement réussi à coincer suffisamment Charlie pour qu'il en arrive à ce genre de choses ?
Je ne sais trop quoi dire. Cela est beaucoup trop surprenant, ou alors ces russes sont vraiment plus coriaces que prévus et plus malins surtout.
Je le regarde en silence quand il nous donne son feu vert à Jaden et moi pour nous occuper du gamin et de l'échange.

Bien. Un sujet précis à aborder avec le Sadovski peut-être ?

J'attendrais la réponse de Charlie avant de prendre congé. C'est la première fois qu'il parle autant en ma présence. Cela doit remonter au jour où j'ai dû tuer mon meilleur ami une discussion aussi longue, et c'était devant tout le gang et sa femme, Ellen.
Je crois que je m'attendais à tout sauf à ce genre d'attitude de la part de mon boss à mon retour de mission. Jamais je n'aurais cru être si bien reçu. Jamais je ne l'aurai imaginé même.

Je passe à côté de Jaden, en béquille, afin de me diriger vers la porte.
Ma première direction sera forcément la grande salle afin de boire quelque chose. Je crois que j'en ai besoin. Ce n'est pas parce que je me contrôle mieux qu'avant que je ne suis pas une vraie boule de nerf à l'intérieur.

Charlie te fait un sourire mystérieux,

Je me suis déjà chargé de cette partie là. Amusez-vous.

Jaden fait demi-tour avec ses béquilles pour t'inviter à le suivre malgré ton regard noir. Tu fermes la porte du bureau de Charlie pour le suivre jusqu'au salon où vous vous désaltérez tout en avalant quelques morceaux de pizza que des mecs ont commandé pour tout le monde.

Lorsque vous êtes prêts, vous sortez de la villa italienne afin de prendre une voiture. Jaden te laisse conduire bien qu'il le pourrait malgré sa jambe blessée. Il t'indique une direction que tu connais plutôt bien : Staten Island.

Vous arrivez après une trentaine de minutes. Il te mène ensuite dans une zone privée pour amarrer des bateaux. Vous descendez sur le ponton pour monter à bord d'un beau bateau portant le nom "Afterlife". Vous montez, il y a deux hommes qui sont assis autour d'une table, tandis que d'autres sont en train de patrouiller à l'extérieur et à l'intérieur.

Jaden descend les escaliers intérieurs pour arriver dans une pièce où tu te trouves face à un grand brun ballonné et attaché aux mains et aux pieds. Il vous lance un regard mauvais. Glacé.

Hum... Voir Charlie agir de manière mystérieuse après son attitude de tout à l'heure est vraiment surprenant. Que s'est-il donc passé chez lui ces derniers mois ?
Je ne relève néanmoins pas, j'acquiesce simplement avant de suivre Jaden qui me fait signe de le suivre. Je le suis non sans être en colère contre lui. Je me détends légèrement lorsqu'on mange dans la grande salle. Je crois que j'étais suffisamment affamée pour pouvoir me calmer l'esprit facilement avant d'encaisser quoi que ce soit d'autre ou de "pardonner" à certaines personnes certains secrets gardés.

En tout cas, je le suis une fois qu'on a fini. Je ne fais aucune remarque lorsqu'il me laisse le volant. Je sais très bien que ce n'est pas une telle blessure qui l'aurait empêché de conduire. Non. Il préfère qu'on ne prenne qu'une voiture et que ça soit moi au volant.
Bien. Cela me permet de réfléchir un peu durant tout le trajet qui nous mène, comme je le remarque assez tôt, vers Staten Island. Charlie a dit qu'on avait carte blanche... Carte blanche...

Ces paroles ne cessent de se répercuter dans mon esprit alors que mes mains se serrent par moments sur le volant. Amusez-vous également. Qu'a-t-il déjà fait par rapport à la partie sur le blabla ?
Je me mords la lèvre inférieure de nervosité un peu, signe facilement décelable et distinctif chez moi. Même si je me doute qu'il sera obstrué, je ne peux m'empêcher d'appréhender ce moment.
Il fait partie de la famille qui a enlevé, séquestré et torturé mon mari. C'est un putain de Sadovski qui s'en est pris à ma famille. Et je ne peux m'empêcher de ressentir à nouveau de la rage grandir en moi.

Quand Jaden m'indique le chemin du port, je l'écoute, trop bouleversée pour être surprise. Pourtant, je n'aurais jamais pensé à un bateau pour cacher et séquestré un homme. C'est une bonne idée si on y regarde bien.
Surprenant mais ingénieux.
Je sors donc de voiture en observant le bateau qui nous fait face, le Afterlife semble-t-il. Je marche à la suite de Jaden qui connaît les lieux mieux que moi, et je le suis donc à l'intérieur après avoir remarquer que le navire était bien gardé.

On pénètre à l'intérieur du navire pour nous diriger vers une pièce où se trouve notre prisonnier. Je sens mon cœur battre fort contre ma poitrine. Enfin. Enfin l'un de ces enfoirés face à moi, qu'importe tous ceux que j'ai tué jusqu'ici de ce gang ennemi, ce sont eux que je vise, que nous visons tous, les membres de la fameuse famille russe sur toutes les lèvres : les Sadovski. Cela me donnerait presque envie de cracher rien qu'à le prononcer.

J'entre et observe enfin la personne qui pourra peut-être me permettre de récupérer Bastian.
Et son accueil, bien que silencieux vu qu'il est bâillonné, n'en reste pas moins glacial comme je l'imaginais. En même temps, se faire enlever, je sais ce que ça fait et à quel point on se sent en colère et même impuissant. Je ne peux m'empêcher de le reluquer de la même façon qu'il nous reluque, avec un regard glacial. J'ai le visage fermé. Je m'approche à un peu plus d'un mètre de lui, et m'accroupit de manière presque nonchalante, mon charme actif comme chaque fois que je suis en mission. Car il s'agit bien d'une mission, n'est-ce pas ?

C'est donc à ça que ressemble un héritier Sadovski, hein ?

Je penche la tête sur le côté gauche. Ma voix est froide car remplie d'une colère contenue.

Je m'attendais à mieux. Un simple gamin. Je suis déçue.

Je me relève afin de le toiser avec toute ma rage possible dans le regard et sur le visage malgré le reste.

Si je te disais que tu as la fameuse pute que vous cherchez depuis des semaines devant toi, tu réagirais comment ? Ouais. J'ai rencontré tes petits copains dans le désert. Il n'en reste que des cendres.

Sourire carnassier.
Un gosse. Un putain de gosse qui n'a même pas la majorité je parie ! Je lui donne moins de 21 ans. Tout ça m'énerve.

Ah oui, c'est vrai... Tu ne peux pas parler. Attends... On va régler ça.

Je m'approche suffisamment pour pouvoir lui enlever son bâillon tout en me retirant rapidement pour éviter n'importe quel geste brusque de sa part.
Autant qu'il puisse parler un peu, voir son niveau intellectuel et son état psychologique aussi par la même occasion.

Il te fait un sourire mauvais, qui te glacerait presque le sang. Il y a quelque chose de mauvais chez ce garçon, de démoniaque presque. Ses muscles se contractent devant tes paroles : il a l'air impulsif.

Ferme ta gueule salope. J'en ai saigné plus d'une comme toi pour moins que ça.

J'en ai rien à foutre de ce que t'as fait aux miens, tout ce que je sais c'est que mon frère va me retrouver. Et il va tous vous défoncer. Avec mon aide quand je serais plus attaché.

Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il semble impulsif à voir ses muscles se contracter facilement à l’œil nu, et surtout à voir comment il réagit à mes paroles. Il en serait presque effrayant s'il n'était pas attaché. Ce mec semble vraiment dangereux.

Par contre, il ne semble en effet pas très futé. Il compte sur son frère ? Ne vient-il pas de dire inconsciemment que c'est son frère le plus fort des deux et qu'il n'est là qu'en dernier recours pour l'assister ?
Cela me tire à mon tour un sourire mauvais, les bras croisés contre ma poitrine.

Tu me fais vraiment pitié. N'as-tu donc pas d'amour propre ? Je croyais que tu étais le fameux fils héritier ? Et tu me parles d'un bâtard pour venir t'aider ? Mais dis-moi...

Je m'accroupis afin de le regarder à la même hauteur que lui, la voix glaciale.

N'as-tu donc aucune fierté ? Me dis pas que t'es si impuissant que t'as besoin de jouer l'assistant pour ce mec qui ne vise qu'une chose à t'entendre : devenir l'héritier à ta place ? "Et il va tous vous défoncer, avec mon aide" et blablabla.

Je me relève pour le toiser à nouveau de haut, utilisant mon autorité au maximum de mes capacités.

Tu me donnes envie de vomir.

Je me tourne ensuite vers Jaden qui est resté dans la pièce non loin.

Qu'a fait notre chef avec lui exactement ? Qu'on ne fasse pas la même chose.

Petit sourire mystérieux.

Aleksandr se met à rire quand tu lui fais des remontrances telle une mère à ses enfants,

Tu ferais mieux de me torturer un peu au lieu de me parler salope. Je pense bien ce que je veux.

Jaden te regarde un instant,

Tu peux faire ce que tu veux tant que tu ne l'abimes pas trop. C'est une sorte de cadeau du boss puisqu'il est l'un de ceux qui ont attrapé Bastian.

Le Sadovski relève les yeux en arrêtant de rire,

Bastian... Ah oui. Celui à qui mon Père a arraché les yeux et coupé tous les doigts. Il risque de pas être en très bon état si vous arrivez à le revoir un jour. Il se rapproche plus du cadavre plutôt que de l'être vivant.

Je continue de regarder le jeune Sadovski qui essaie vainement de me sortir de mes gonds afin que je réplique.
Jaden m'explique qu'on peut en faire ce qu'on veut tant qu'il reste reconnaissable, un "cadeau" de la part de Charlie. J'ai jamais eu l'envie de torturer quelqu'un avant, et je ne sais pas si c'est ce dont j'ai envie aujourd'hui.

J'y réfléchis en silence, fixant cet héritier russe en face de moi, par terre, avant de l'entendre déblatérer sur Bastian.
Ce qu'il me sort, bien que cela me fasse quelque chose, ne me surprend pas. Si je m'étais attendu à ce qu'on me rende mon mari intact, je ne serai pas là aujourd'hui, et je me serai retirée du gang afin de refaire ma vie ailleurs. Or j'ai eu le temps de me faire à l'idée, même si ça m'est douloureux.

Néanmoins, il commence à m'énerver à faire le fier, alors qu'il est à notre merci. Je me rapproche de lui, un sourire glacial aux lèvres.

Et qu'est-ce qui te fait croire qu'on ne va pas te faire la même chose ?

Grand sourire avant de lui foutre une gifle monumentale au visage afin de le faire valser, je le relève, lui remets son bâillon, avant de lui foutre cette fois un coup de pied dans le ventre après lui avoir repoussé la tête violemment au sol.

Tu es seul, ici, mec. Boss ou pas, j'en ai rien à foutre, je te ferai la même chose avec un plaisir non dissimulé.

Un autre coup de pied.
Se défouler. Je crois que c'était ce qu'il me fallait depuis environ une heure que je sais qu'on a obtenu une sorte de monnaie d'échange.
Avant de repartir, je lui crache au visage. Il doit comprendre qu'il est notre prisonnier, et que la torture ne nous gênera pas. Je me suis pas entraînée pour entendre des abrutis se la ramener en situation délicate.

Jaden. Dis-moi où l'on peut trouver un outil permettant de lui arracher les ongles un à un. Ainsi qu'un produit permettant de rester éveiller. Il ne faudrait pas que notre prisonnier échappe à son sort et à la torture. Ce serait tellement dommage...

Je lance en retour un regard froid et glacial à cet Aleksandr ? Si je me souviens bien. Je m'en fiche de savoir Bastian en un seul morceau ou non, on a pas besoin de me le rappeler qu'il sera différent. Mais par contre ceux qui lui ont fait ça m'intéresse beaucoup plus.
Je lui jette un dernier regard avant d'aller prendre un peu l'air et réfléchir à la meilleure façon de lui faire faire dans son froc.

J'attends que Jaden me rejoigne pour lui parler.

Est-on vraiment en sécurité et introuvable ici ?

Jaden hausse les épaules,

Je suppose que oui, vu que c'est Charlie qui a tout organisé. Pour ce qui est de la torture... Tu es sûre de vouloir faire ça ? Tu ne vas pas le regretter après ?

Il te regarde droit dans les yeux à cette question. Est-ce que ce que tu demandes ne dépasse pas tes réelles capacités ?

Tu devrais y réfléchir, t'as pas dormi de la nuit, va te reposer un peu, de toute façon il bougera pas de là.

Il te désigne un petit hôtel non loin avec un café en dessous où tu pourras te reposer. Comme il insiste tu cèdes, et va donc te reposer. Tu ne dors pas d'un sommeil agréable, tu repenses à ce que t'as dit le jeune russe.

Tu te réveilles pourtant en fin de matinée sur la terrasse du café avec un petit déjeuner. Ton portable se met à vibrer plusieurs fois : tu as un appel privé. Souhaites-tu répondre?

Je me sens pas en sécurité, mais je préfère croire les paroles de Jaden selon lesquelles Charlie a organisé cette cachette. Il est censé être invisible depuis des années, non ? Donc en effet, cette nouvelle planque à bord d'un navire doit être suffisamment sécurisé. Mais je ne peux m'empêcher d'être mal à l'aise.

D'ailleurs Jaden a parfaitement raison, même si tuer des hommes ne me posent plus autant de problèmes qu'avant, torturer quelqu'un m'est difficile. Je suis déjà passée par ça, et si je ferme les yeux, ça m'arrive de revoir ces heures de calvaires...
Je sais bien que je ne pourrais certainement pas le faire, mais pourquoi Bastian serait le seul à être torturé ?
Ce n'est que justice de lui faire un peu la même chose à ce jeune Sadovski. Sinon, que pourrais-je en faire à part l'écouter déblatérer ses conneries ?

Alors que je voudrai rester à bord du bateau, Jaden insiste pour que j'aille me reposer dans l'hôtel non loin du port. Je finis par céder, non sans mal, et le sommeil arrive avec difficulté.
Malgré les derniers événements et les dernières informations qui ne cessent de me hanter, même en plein rêve, je dors une bonne partie du cadran. Je me réveille en meilleur forme, mais d'humeur un peu grognon je crois. Je ne sais pas ce que l'avenir me réserve et ça commence à m'effrayer.

Je pense encore à ça, attablé à une table du café sous l'hotel pour prendre un petit déjeuner tardif, quand je sens mon portable vibrer une fois. Je ne décroche pas, mais le pose sur la table à mes côtés. Il vibre encore une autre fois. Là je le fixe un peu perplexe.
Je ne connais pas le numéro qui s'affiche en privé. Qui m'appellerait ? Lola est avec les enfants en Sicile, soit à l'autre bout de la planète pour moi. Jaden a mon numéro et s'affiche correctement. Charlie ne m'appellerait certainement pas.
Alors qui ?
Les russes ? Ils nous auraient déjà retrouvé ? Je regarde discrètement autour de moi voir si je ne vois personne de suspect, d'après mon instinct.

Finalement je décide de décrocher. Qui que ce soit, cette personne est bien insistante et au moins serai-je fixée.

Qui est à l'appareil ?

Tu choisis de répondre, c'est une voix plutôt familière qui te répond. Bien que cela fait plusieurs mois que tu ne l'as pas entendu... Bryan Summer.

Après avoir raccroché avec un "ancien collègue" de boulot, Bryan Summer, je reste un peu perplexe alors que je me dirige vers le port où se trouve notre navire.
Cela m'a fait plus bizarre que ce que je pensais d'entendre à nouveau la voix de Bryan, d'autant plus qu'il y avait plus d'assurance encore dans sa voix. Comme s'il détenait un nouveau savoir qui lui permettait d'être un peu hautain. C'était assez étrange. Même sans le voir, ça se sentait que quelque chose avait changé comme il l'a si bien dit.

En tout cas, son offre d'agir à la place de Charlie dans le but de le préserver est surprenant. En quoi ça le gêne que les Niners puissent tomber, même si ça n'arrivera jamais ?
Et pourquoi seulement maintenant ? En tout cas, il a l'air d'avoir des informations au sujet du frère d'Aleksandre, et ça pourrait être intéressant d'entendre ce qu'il a à dire dessus, par contre, qu'il soit si proche de nous me paraît plus surprenant encore.

Enfin, je dois en parler avec Jaden, peut-être qu'il en saura plus ? Sachant qu'il était au courant pour Bastian et sa mission... Peut-être est-il au courant de certains trucs sur Bryan Summer qui était caché je ne sais où depuis plusieurs mois ?
Et le prévenir que des "hommes" bien que je ne sache pas à quoi ils ressemblent, sont en route pour nous apporter du renfort pour je ne sais encore quoi.

Bref.
C'est d'un pas décidé que je me déplace vers la cachette de notre prisonnier. Je n'ai que trop dormi.

Jaden est accoudé au bord de la rambarde du bateau, il tourne la tête vers toi en arrivant, il fronce les sourcils quand tu lui parles du coup de fil de Bryan,

Il pourra bien tenter ce qu'il veut, Charlie a dit que le russe reste ici, donc il reste ici. Au pire si on se fait attaquer, on a une immense ouverture par l'océan.

Quand à Bryan, c'est un chef de gang aujourd'hui. Chef des Eternal Snake, c'est les mexicains qui se baladent en petit nombre sur Staten Island. Charlie l'a financé.

Je ne comprends plus rien. Bryan, un chef de gang ?
Je comprends donc encore moins pourquoi il veut à tout pris interagir avec le plan de Charlie qui semble savoir ce qu'il fait.
Jamais je penserai que Charlie est en position de faiblesse, tout ce qu'il fait ou entreprend a un but bien précis. Je l'ai compris assez vite à mon entrée dans le gang, et encore plus depuis que j'en suis partie avant de revenir.

Il tient ses paroles.
Donc je préfère croire en ce que raconte Jaden, même si l'attitude de Bryan me parait encore plus bizarre.

Un chef de gang ? Financé par Charlie lui-même ? Mais alors pourquoi veut-il agir sans demander l'avis de Charlie ?

Je ne comprends rien.
Mais Jaden a raison, on est nombreux sur le bateau, et même s'il arrive avec du renfort, on a largement le temps de pouvoir s'enfuir pour aller ailleurs.

Je te fais confiance. Je te connais toi, pas Bryan que je n'ai pas vu depuis des mois, après cinq ans d'absence. On fait comme ce qui a été convenu.

Je préfère rester fidèle à mon gang, et croire en ce dernier. On en a vu des pires comme situation, surtout récemment. C'est pas le moment de douter, même si j'ai un mauvais pressentiment.
Je m'adosse à la rambarde du bateau, afin d'avoir la porte par laquelle on a été voir le prisonnier la veille de manière très visible, tout en ayant Jaden à mes côtés pour lui parler.

Et notre prisonnier ?

Je préfère ne pas rappeler l'idée de le torturer de la veille.

Il sourit doucement quand tu lui avoues que tu as confiance en lui.

Ton Bryan a pris la grosse tête depuis qu'il est entré au NYPD. Comme Charlie l'a aidé à monter son gang, il croit qu'il a une position favorable mais il ferait mieux de se méfier. Rien n'est gratuit. Surtout dans la mafia.

Pour ce qui est du russe, il dormait quand je suis allé voir. Il a fait la java cette nuit, il a dû finir par se calmer.

J'enregistre ce qu'il me sort à propos de Bryan silencieusement. J'observe nos hommes aller et venir sur le navire pendant qu'on parle.
Même si je ne comprends pas trop Bryan, et même si je ne peux que penser qu'en effet on nous recherche, je préfère m'assurer qu'on a assez d'hommes et qu'ils sont sur le qui-vive.

Et ton mollet ? C'est là que tu t'es blessé, non ?

Si j'ai bien vu, ça ne semblait pas être la jambe ou le genou. Aucune attelle, ni aucun plâtre n'est présent, il a simplement des béquilles.

Tu crois pas qu'on devrait bouger quand même un peu ? J'aime pas rester sur place aussi longtemps et l'air marin nous ferait du bien à tous après l'air du désert.

Je me recule de la rambarde pour aller en direction de la porte du prisonnier.

Je vais aller le voir. Pas question qu'il dorme et recharge ses batteries.

Je m'apprête à m'engouffre dans le navire, sauf si Jaden veut me parler ou m'en empêcher, afin d'aller balancer un seau d'eau au visage de notre prisonnier afin qu'il reste réveiller, ou lui foutre un coup à la tête pour l’assommer ensuite, j'en sais rien. J'ai pas envie de le torturer, Jaden a raison sur ce point, je suis pas faite pour ça, mais on peut bien l'amocher un peu, non ?

Jaden hausse les épaules,

Mon mollet ça va, je fais avec. J'ai pris les béquilles pour pas m'appuyer dessus et rouvrir les points de suture. Le muscle a été touché donc faut éviter que je bouge trop pour pas l'endommager encore plus.

Il te laisse descendre voir le prisonnier, et passe un coup de fil en attendant au sujet de votre sortie en mer.

Ton coup de pied dans les côtes à le mérite de réveiller Aleksandr qui crache légèrement ses poumons en te foudroyant du regard avec son bandeau dans la bouche. Tu jurais qu'il rêverait de t'ouvrir le ventre et de jouer avec tes entrailles.

Tu entends la voix de Jaden de la petite chambre où vous êtes,

C'est ok pour la sortie ! O'Neil, démarre le bateau, vous autres, décrochez l’amarrage et attendez ici.

Le moteur du bateau démarre tranquillement et vous commencez à vous éloigner doucement du ponton de la Marina. Tu aperçois depuis le hublot des hommes en verts de type mexicain. Serait-ce les hommes de Bryan ? Quoiqu'il en soit tu viens de leur mettre un vent.

» Episode 2 : Pour une goutte de sang [Abigail J. Farlos]
» Episode 4 : Les Nomades [Abigail]
» Episode 3 : Choix [Abigail J Farlos]
» Episode 1 : Retour [Abigail J. Farlos]
» Episode 7 : Jouer avec le feu [Abigail]